octobre 26, 2005
3 - LOI ET CREATION, lettre d'un Kabbalsite à un Rabbin !: Emmanuel LEVYNE
Emmanuel LEVYNE
Lettre d’un kabbaliste à un rabbin
(Loi & Création)
TSÉDEK
17, rue Bleue (75009) Paris
DU MEME AUTEUR
Le Royaume de Dieu et le Royaume de César, Le Réveil, 1973
Le judaïsme contestataire, Tsédek, 1974•
Petite Anthologie de la Mystique Juive, Tsédek, 1975.
La Kabbale du Aleph, Tsédek, 1976.
Un Kabbaliste à la rencontre de Nicolas Berdiaev, Tsédek, 1977.
Revue Tsédek
N° 152 : La Kabbale du Aleph (Correspondance et compléments)
N° 153 : Carlo Suarès, La Kabbale et la Technologie
(Textes de E. Lévyne, C. Suarès, O. Goldberg, R. Guénon, H. Marcuse)
[fin page 6]
– AVERTISSEMENT –
Cet écrit est un complément à la Petite Anthologie de la Mystique Juive. Nous l’éditons à part afin de ne pas trop épaissir la deuxième édition de ce livre déjà considérablement augmentée et de rendre ainsi ces deux titres accessibles aux lecteurs peu fortunés.
Cette Lettre d’un Kabbaliste à un Rabbin a été inspirée par la lecture du cahier spécial sur le Hassidisme de la revue Trait-d’Union (n° 81 - 82, janvier-février 1961), éditée par la Communauté Juive Traditionaliste de la rue de Montévidéo à Paris.
Cette publication était dirigée par le rabbin Jean Schwarz, pour lequel l’auteur – qui avait enseigné dans son cours d’instruction religieuse à Montmartre – éprouvait la plus grande estime et le plus profond respect.
Cette lettre, avec les très importants textes anthologiques qui l’accompagnent – dont certains sont traduits pour la première fois en français, de l’araméen ou de l’hébreu – n’a jamais été publiée.
Ce retard est heureux, car au début des années soixante le public n’accordait pas à l’ésotérisme en général, à la Kabbale en particulier, l’intérêt qu’il lui manifeste actuellement. Le temps des vrais kabbalistes est-il arrivé ? Si nous ne le pensions pas, nous ne ferions pas l’effort d’éditer ce travail comme les autres ouvrages du même auteur sur la mystique juive. Et il est dans notre programme d’éditer d’autres kabbalistes méconnus ou inconnus, avec l’aide financière et technique que voudront bien nous apporter les amis et lecteurs de TSEDEK.
« Quand approchera l’époque messianique, nos mystères seront divulgués à tout le monde. (Zohar 1, 118 a.)
C’est la référence de notre action d’édition et d’enseignement, pour que s’accomplisse le verset du prophète cité dans ce texte du Zohar : « Alors je donnerai aux peuples des lèvres pures, afin qu’ils invoquent tous le nom de l’Éternel pour le servir d’un commun accord. » (Sophonie 3, 9.)
Tsédek
Nous nous représentons que la loi existe pour diriger l’homme et le punir le cas échéant. Les Grecs recherchaient toujours et partout et nous ont enseigné à rechercher les lois pour s’y soumettre. Cependant, l’Écriture nous fait entendre autre chose : quand Moïse se tenait sur la montagne en face de Dieu, il n’y avait pas de loi ; quand il descendit de la montagne, il gouverna le peuple au moyen de la loi. Là où est Dieu, il n’y a pas de loi : c’est la liberté ; et là où la liberté n’est pas, Dieu n’est pas.
Léon Chestov, Athènes et Jérusalem
« Au commencement », il n’y avait pas de lois ; la loi est venue plus tard. Et à la fin, il n’y aura plus de lois.
Léon Chestov, Sur la balance de Job
Dans les temps messianiques, les commandements seront supprimés.
Talmud Nida, 61 a
L’abolition de la loi, c’est le fondement de la Tora.
Talmud Menahoth, 99 b
– PREMIERE PARTIE –
Issy-les-Moulineaux le 24 08 1962.
Monsieur le Rabbin Jean Schwarz
directeur de la revue – Trait-d’Union –
Cher Monsieur le Rabbin,
Je lis et j’étudie toujours avec beaucoup d’intérêt vos numéros spéciaux. Dans celui consacré au Hassidisme, la plupart de vos collaborateurs ont minimisé les divergences entre la conception hassidique et la conception purement rabbinique. Par exemple, pour le rabbin Gugenheim, ce qui aurait séparé les Hassidim des Mitnaguedim, ce n’était qu’une différence d’horaire de la prière. Dans ce cas, on ne comprend pas la rigueur dont a fait preuve le Gaon de Vilna, qui avait proclamé que le sang des Hassidim pouvait être versé comme de l’eau.
En général – excepté évidemment M. André Neher dont les textes sont parfaits à tous égards – vos collaborateurs ne semblent pas avoir une connaissance très profonde de la mystique juive et surtout son expérience –, car chaque fois qu’ils abordent son domaine, ils s’y perdent – et leur hébreu avec eux.
Ainsi, je m’étonne de lire dans les textes de vos collaborateurs que le mot Tora signifie Loi, que le Judaïsme est essentiellement et totalement une Loi. C’est là le point de vue d’un certain rabbinisme. Mais on ne peut émettre une telle opinion du point de vue de la Kabbale.
Comment un hébraïsant peut-il traduire le mot Tora par Loi ?
[Fin page 17]
Tous les• dictionnaires indiquent que le mot Tora vient d’une racine (Y-R-H) qui signifie enseigner. La Tora, c’est l’enseignement divin.
On peut également faire venir ce mot de la racine A-O-R, Lumière ; et cette étymologie a ses références dans la littérature kabbalistique (et aussi talmudique et biblique).
Prov. VI,23 : ki ner mitsva vetorah or : La Tora, c’est la Lumière.
Meguilla 16 b : ora zou tora : La Lumière, c’est la Tora.
Tikouné Hazohar, Tikoun XI, 26 b : Il y a un Palais de la Lumière (hehela dinehora) qui ne s’ouvre que pour l’homme qui s’occupe de la Lumière de la Tora (nehora deoraïta).
La Tora, c’est la doctrine de la Lumière, c’est-à-dire, selon les nombres de la racine A-O-R-, la science des rapports justes entre l’Infini (1) - et (6) -le fini (2(00)), entre Dieu et l’homme, entre Dieu et le monde.
La Tora est essentiellement la Loi, et c’est en tant que Loi que le Judaïsme se distingue des autres religions, son originalité est dans sa Loi. Ainsi s’expriment vos collaborateurs.
Du point de vue de la Kabbala, ce n’est pas exact. La catégorie essentielle de la Tora et de l’Hébraïsme n’est pas la Loi, mais la Création. Les trois premières lettres de la Tora sont B-R-A, racine de la CRÉATION : le premier verbe de la Tora est également B-R-A : créer. Le mot et le verbe originel de la Tora, c’est la Création. La Tora commence là où il y a Création.
Le but de la Tora n’est pas de faire de l’homme un être soumis, mais un être qui soit à la ressemblance de Dieu, c’est-à-dire un être créateur et libre.
Bien que la Création et la Loi s’excluent, il faut reconnaître que dans la Tora il y a une Loi – la Loi de Moïse. Mais cette Loi est une partie de la Tora – et non toute la Tora ; et c’est là que réside essentiellement la [Fin page 18 ] divergence entre le point de vue de la Kabbala et le point de vue du Rabbinisme.
Pour la Kabbala, la Loi ne représente qu’un temps de l’histoire de la Tora, elle n’est qu’un des avatars de la Parole de Dieu dans le monde.
Son règne est transitoire. Elle s’est manifestée et imposée à la suite du péché du veau d’or (l) et elle disparaîtra à la venue du Messie (2). Pour tout Israël. Mais même dans les temps prémessianiques, le Kabbaliste – c’est-à-dire l’homme qui est plongé jour et nuit dans l’étude du Zohar – échappe à la servitude de la Loi. Car la Loi a pour but de protéger l’homme du mauvais penchant et de l’aider à le vaincre. Or l’étude de la Kabbale a la propriété d’extirper ontologiquement le mal. La Loi n’a donc plus de raison d’être pour l’homme qui vit entièrement dans l’univers kabbalistique (3).
D’une manière plus systématique, la Kabbala divise Israël en deux grandes classes (4) :
I – Les Kabbalistes (ou les Justes), qui sont attachés à la Tora de l’Arbre de Vie – la Tora de Atsilouth –, qui était celle des Patriarches et que Moïse reçut (kabbala) au mont Sinaï : cette Tora spirituelle formait le contenu exclusif des premières Tables, qu’il brisa à la vue du peuple adorant le veau d’or. Seuls les Kabbalistes portent le nom d’Homme ; ils sont les fils du Roi ; ils vivent dans le monde sephirotique.
II – Le reste du peuple – la masse et ses dirigeants –, qui sont soumis à la Tora de l’Arbre de la Connaissance du Bien et du Mal – la Tora de Beria – c’est-à-dire à la Loi.
Cette dernière classe se subdivise en deux catégories, comme l’arbre qui la gouverne.
A. Les Bons : les rabbins et les hommes pieux qui s’efforcent d’observer les commandements ; ils sont les serviteurs du Roi ; ils vivent dans le monde angélique.
B. Les Mauvais : les impies et les libertins ; ils sont comparables à des bêtes, ils vivent dans le monde démoniaque.
Bref, la Loi régit le monde angélique et animal, c’est-à-dire les créatures statiques ; l’homme qui observe la Loi est semblable à un ange, l’homme qui ne la respecte pas à une bête.
La destinée propre de l’homme, c’est de vivre dans l’univers divin, c’est-à-dire de participer à la vie du Créateur. Le monde de l’Homme, c’est le monde de Dieu, qui se trouve au-dessus du monde des anges (5).
La Loi == hiérarchie angélo-animale, nature statique.
Kabbale == hiérarchie humano-divine, nature créatrice.
La Loi est la partie extérieure de la Tora, elle est ce qu’est la paille au grain, l’écorce au germe (6). Elle n’est pas la nourriture propre de l’Homme, fils de Dieu, mais de l’Homme déchu, de l’Homme qui a perdu son âme divine, sa nechama ; elle lui permet de ne pas succomber et de ne pas tomber au fond de l’abîme. L’homme qui fait une chute se casse des membres et se blesse : il a besoin de béquilles et de pansements. Tel est le rôle de la Loi et de ses commandements : Mais l’homme qui se porte bien n’a que faire des béquilles, des remèdes et des médecins. Tel est le Kabbaliste, tel sera Israël aux temps messianiques.
Et les rabbins sincères et intègres ont conscience de la fonction thérapeutique de la loi (7), donc de son utilité et de son existence temporaires (8). Une des preuves est qu’ils n’appellent pas la Loi rabbinique Loi, mais Halakha, qui signifie marche, mouvement. Comme le souligne le grand rabbin Fingerhut dans son article, le verbe Halakh « n’indique pas le but à atteindre, mais la marche à suivre. »
C’est bien cela : la Loi est la Halakha de la Tora, c’est-à-dire qu’elle permet à l’homme de se diriger vers son but : l’univers divin, l’univers sephirotique. Mais une fois qu’on est arrivé, la marche cesse. Il n’y a plus de Halakha (9).
L’homme qui a compris le sens du mot Halakha a saisi toute la Tora et toute la tradition juive.
La Loi véritable, c’est la Loi de Moïse, les 613 commandements dans toute leur rigueur.
La Halakha ce n’est plus la Loi de Moïse ; elle est trop miséricordieuse, trop humaine, trop dynamique, trop créatrice, trop souple, trop personnalisée, pour porter le nom de Loi. La Halakha ne soumet pas l’homme à la Loi, au contraire, elle l’en détache, et le délie doucement, insensiblement (10), car il est dangereux de rendre brusquement la liberté à un homme qui s’est habitué à la servitude, laquelle lui est devenue une seconde nature.
La fonction rabbinique n’est pas une fonction juridique, mais pédagogique et médicale. Le rabbin est un médecin. On reconnaît celui qui est honnête à ce qu’il souhaite, comme son maître Moïse, que le temps vienne où le monde n’aura plus besoin de lui et où sa science ne sera plus d’aucune utilité (11).
Je soupçonne certains de vos collaborateurs d’être des rabbins Knock.
Chalom Aleikheim.
Emmanuel Lévyne.
P.S. Attention : on ne peut trouver dans cette lettre aucune justification à la position des Juifs dits libéraux et de ceux qui vivent en dehors de la tradition juive. Le Kabbaliste, qui s’élève au-dessus du monde de la Loi, c’est le Juif qui étudie et médite jour et nuit la Tora selon le Zohar, afin d’unir le Saint, béni• soit-il, à sa sainte Chekhina ; il n’exerce aucune autre activité : il est donc pauvre et vit de charité (12). Ce type de kabbaliste n’existe pratiquement plus de nos jours – du moins en France et à Paris. La Loi rabbinique, dans son expression la plus orthodoxe, doit donc continuer à gouverner la vie des communautés juives – et cela d’autant plus rigoureusement que le niveau social des familles juives a tendance à monter en flèche. Le pauvre a moins besoin [fin page 21] de la loi que le riche, car il est moins tenté que lui par le mauvais penchant (13). (Les femmes, les spectacles, la boisson, la bonne chère ... ça coûte cher. Quand on n’a pas le sou, on n’intéresse pas le Tentateur ... ou la Tentatrice (Samaël et Lilith). Le pauvre n’a pas de quoi fabriquer le veau d’or.)
Je ne peux donc que souhaiter le succès de l’action des communautés orthodoxes, comme celles de la rue de Montevideo et de la rue Cadet, et je me déclare résolument hostile au Judaïsme libéral, à plus forte raison aux Juifs qui vivent sans foi ni loi et qui se croient émancipés et libérés, alors qu’ils sont tombés à un degré plus bas que celui de la bête.
RÉFÉRENCES
1) Zohar l, 26 b.
2) Zohar III, 124 b, R.M.
3) Zohar II, 117 b -118 a, R.M.
4) Zohar III, 98 a - b, R.M. ; 224 b, R.M. ; 252 b - 253 a, R.M.
5) Roch Hachana, 17 b.
6) Zohar Hadach, Tikounim, 73 b ; Tikouné Hazohar, Tikoun 69 b, 114 a.
7) Eroubim, 54 a ; Berakhoth 5 a ; Midrach Rabba, Genèse, 44.
8) Maccolth 24 a ; Sanhédrin 97 a.
9) Menakhoth 99 b.
10) Berakhoth 19 b.
11 ) Jérémie XXXI, 31 - 34.
12) Zohar III, 126 a, R.M. ; Zohar Hadach, Tikounim, 63 a - b.
13) Zohar III, 8 b - 9 a.
– DEUXIÈME PARTIE –
1 – LA TORA, C’EST LA LUMIÈRE.
Zohar III, 216 a - b :
« Lorsqu’il se trouve un juste, dont les mérites et les actes éclairent la Matrona (La Chekhina), en la débarrassant des vêtements noirs du sens extérieur et littéral (pechat) afin qu’elle apparaisse dans tout l’éclat de sa beauté avec les vêtements de couleurs lumineuses des secrets de la Tora (sens kabbalistique), qu’est-il écrit alors à son sujet ; « Et je la verrai pour me souvenir de l’alliance de toujours. (1) » « Et je la verrai ... » par les secrets lumineux de la Tora, car la lumière est appelée « secret ». (Lumière = A-O-R == 1 + 6 + 200 == 207 == Secret == Ra - Z == 200 + 7 == 207). »
Note : La Tora, qui est essentiellement Lumière, c’est donc substantiellement le sens kabbalistique donné par les nombres des lettres hébraïques. Le sens extérieur : les lois et les récits pris à la lettre recouvrent le sens kabbalistique et obscurcissent la Lumière de la Tora qui ne peut éclater que lorsqu’on lui enlève ses vêtements sombres que sont les interprétations littérales (pechat).
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Tikouné Hazohar, Tikoun, XXII, 67 b
« Et Abraham se leva tôt le matin. (2) » Il se leva pour la délivrance. C’est le matin que la Lumière paraît. Il est écrit à son sujet ; « Et la Tora est Lumière. (3) » Cette Lumière est celle dont il est dit : « Et pour tous les enfants d’Israël il y avait de la Lumière. (4) » Il s’agit de la Lumière de la Pâque, le bras droit, par .laquelle s’opérera la Libération. »
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(1) Gen. 9, 16. (2) Gen. 19, 27.
(3) Prov. 6, 23. (4) Exode 10,23.
[fin page 25]
II – LE RÈGNE DE LA TORA EST TRANSITOIRE.
Zohar 1, 27 b - 28 a :
« Tant que les Intrus seront mêlés à Israël, il n’y aura point de rapprochement entre les lettres du nom YHVH, mais aussitôt qu’ils seront effacés du monde, l’Écriture dit au sujet des lettres du Saint, béni soit-il : « En ce jour là, YHVH sera un, et son nom sera un. (1) » c’est-à-dire uni. C’est pourquoi l’Homme, qui est Israël, trouve son unité dans la doctrine ésotérique, dont l’Écriture dit : « Elle est un arbre de Vie pour ceux qui l’embrassent ; et heureux celui qui se tient fortement uni à elle. (2) » Cet arbre de Vie est la « Matrona », symbolisée par la Sephira « Malkhouth » ; c’est pour cette raison, qu’Israël est appelé « Fils de rois ». C’est pourquoi le Saint, béni soit-il, a dit : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul ; faisons-lui une aide contre lui. (3) » Par cette « aide contre lui », l’Écriture entend la « Michna » servante de la Chekhina ; cette servante a été donnée pour épouse à Israël pendant son adolescence. Elle était tantôt son aide, tantôt contre lui. Ainsi, la Michna sert à Israël, durant la captivité, d’épouse ; elle est tantôt son aide, par les sentences : « Pur, permis à manger, l’acte est légal » ; elle est tantôt contre lui, par les sentences : « Impur, défendu à manger, l’acte est illégal ». La loi relative aux menstrues pures et impures est l’image de l’inconstance de la servante de la Chekhina. Cette épouse, qui est la Michna, est indiquée dans les paroles de Dieu : « Une aide contre l’homme » ; car l’union d’Israël avec cette épouse n’est pas parfaite. Israël ne trouvera l’union avec l’épouse véritable qu’à l’époque où les Intrus seront effacés du monde. C’est pourquoi Moïse a été enterré hors de la terre sainte. « Et personne ne connut son sépulcre jusqu’à ce jour. (4) » Le sépulcre désigne la Michna qui, durant l’adolescence d’Israël, avait la prééminence sur la « Matrona » que Moïse avait entrevue. C’est pourquoi, l’Écriture dit : « La terre est troublée par trois choses, et elle ne peut supporter la quatrième : par un esclave, lorsqu’il règne ; par un insensé lorsqu’il est rassasié de pain ; par une femme digne de haine, lorsqu’un homme l’a épousée ; et par une servante, lorsqu’elle prend la place de sa maîtresse. (5) » L’esclave qui règne désigne l’esclave que l’on sait, c’est-à-dire Samaël ; la servante qui prend la place de la maîtresse désigne la Michna, qui prend la place de la Matrona, qui est la Kabbala de Moïse ; [fin page 26] et l’insensé qui est rassasié de pain désigne les Intrus, qui sont appelés « le peuple d’insensés et nullement sages ». »
Dans ce texte :
Kabbala == Matrona == Chekhina == Arbre de la Vie == Israël.
Michna == Loi == Métatron == Arbre de la science du bien et du mal == Intrus.
Les Intrus, d’après Zohar 1, 25 a b, c’est la classe bourgeoise en Israël. Ce sont eux qui ont rendu nécessaire le règne de la Loi.
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(1) Zacharie 14, 9. (2) Prov. 3, 18.
(3) Gen. 2, 18. (4) Deut. 34, 6.
(5) Prov. 30, 21 - 23.
III – LA LOI S’EST IMPOSÉE À LA SUITE DU PÉCHÉ DU VEAU D’OR.
(Référence 1)
Zohar 1, 26 b :
« Ces deux Yod (de Vayyitser) correspondent également aux deux yeux sephirotiques, d’où coulèrent deux larmes qui tombèrent dans le grand océan. Et pourquoi sont-elles tombées dans l’océan ? En raison des tables de la Tora que Moïse fit descendre du ciel, et dont Israël n’a pas été jugé digne d’en profiter. C’est pourquoi, elles furent brisées et jetées. C’est ce qui occasionna la destruction du premier et du second temples. Et pourquoi les premières tables furent-elles jetées, alors que Moïse pouvait s’en servir pour les rendre aux Israélites ? C’est parce que le Vav s’en est envolé. C’est ce même symbole qui est indiqué par le mot Vav du mot « Vayyitser » (et il créa). C’est pourquoi Moise donna à Israël d’autres tables de la Tora, qui étaient du côté de l’arbre du Bien et du Mal. C’est pour cette raison que la Loi est formée de préceptes négatifs et de commandements : « Ceci est permis, cela est défendu » ; c’est parce que la Loi émane de l’arbre du Bien et du Mal. »
IV – LA LOI DISPARAITRA À LA VENUE DU MESSIE.
(Référence 2)
Zohar III, 124 b, Raaya Méhémna :
« Et les savants brilleront comme les feux (Zohar) du firmament. (1) » C’est une allusion à ton œuvre, le livre Zohar, qui reflète la lumière de la Mère suprême, source de la Pénitence. Les Israélites qui étudieront ton livre goûteront à l’Arbre de Vie et n’auront plus besoin d’être mis à l’épreuve. C’est par le livre Zohar qu’Israël sera miséricordieusement affranchi de l’exil ; et les paroles de l’Écriture s’accompliront : « Et l’Éternel (YHVH) sera seul son conducteur, et il n’y aura point avec lui de dieu étranger. (2) » À cette époque, Israël ne dépendra plus de l’Arbre du Bien et du Mal ; il ne sera plus soumis à la Loi qui édicte ce qui est permis et ce qui est défendu, ce qui est pur et ce qui est impur ; car notre nourriture nous viendra, à cette époque, de l’Arbre de Vie, et il n’y aura plus ni questions (quouchia), qui viennent du mauvais côté, ni controverses qui viennent du côté impur, ainsi qu’il est écrit : « Je ferai disparaître l’esprit impur de dessus la terre. (3) »
Araméen : veilana de tov vera deihou isour vehéter tourna vetahara la chalta al yisrael de ha parnassa dilann la lihévé éla misitra de ilana de ’hayé.
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(1) Daniel 12, 3. (2) Deut. 32, 12.
(3) Zach. 13, 2.
V – L’ÉTUDE DE LA KABBALE A LA PROPRIÉTÉ D’EXTIRPER ONTOLOGIQUEMENT LE MAL.
(Référence 3)
Zohar II, 117 b - 118 a, R.M. :
« Pour celui qui est de l’arbre de la vie, il n’y a pas de jugement, .car il n’y a pas de force du mal en lui. C’est le juste parfait (tsadik gamour), le juste qui possède le bonheur (tsadik ve-tov lo), et n’y a de bonheur que la Tora kabbalistique. (…). [fin page 28] Et du côté du juste parfait (tsadik gamour), il n’y a pas de force du mal. »
Le Zohar applique au monde sephirotique, d’où l’âme du Juste ou du Kabbaliste émane et dans lequel il vit, le verset des psaumes : « Le mal n’a pas sa demeure en toi. (1) »
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(1) Ps. (5,5)
VI – LA KABBALA DIVISE ISRAËL EN DEUX GRANDES CLASSES.
(Référence 4)
Zohar III, 225 a, R.M. :
« Tous les Israélites ne sont pas de la même classe : il y en a qui sont fils de roi du côté du royaume saint (la Chekhina) ... ; il y en a qui sont des esclaves, du côté de l’Esclave (l’ange Métatron) ; et il y en a qui sont comme des bêtes.
« Ceux qui ressemblent au troupeau, le Saint, béni soit-il, leur a ordonné de sacrifier des bêtes pour se faire pardonner ; ceux qui ressemblent aux anges, leurs sacrifices ce sont les bonnes actions, car ce sont les anges qui les gouvernent ; et ceux qui sont les fils de l’Éternel, leurs péchés consistant à séparer les lettres du nom de Dieu, leur acte de réparation, c’est l’étude de la Tora de la Kabbale, qui est le nom YHVH, afin d’unir la lettre Y à la lettre H et la lettre V à la lettre H. »
***
Zohar III, 125 a, R.M. :
« D’où savons-nous que les Israélites sont divisés en bêtes et en hommes ? Il est écrit : « Vous, mon troupeau, troupeau de mon pâturage ; vous, hommes. (1) » ( ... ) Et dans un autre verset, il est également fait allusion à cette division d’Israël en deux classes : « Oh ! Si mon peuple m’écoutait, si Israël marchait dans mes voies. (2) » Après avoir dit « mon peuple », pourquoi le texte dit : « Israël » ? C’est parce que « mon peuple » désigne le peuple de la terre – la masse – et « Israël », les Kabbalistes. »
Zohar III, 98 a - b, R.M. :
« Chavouott, c’est le don de la Tora : les deux Tables de la Tora ont été données du côté de l’arbre de vie. Les deux jours de la fête sont le Y et le V du nom divin YHVH ; il faut leur offrir les deux pains qui sont les deux H. Ce pain est le pain de la Tora dont il est dit : « Venez et mangez de mon pain. (3) » C’est la nourriture de l’Homme, qui est Yod Hé Vav Hé.
« Vous, mon troupeau, brebis de mon pâturage ; vous, hommes. (4) » Les maîtres de la Kabbale sont du côté de l’arbre de vie, et le reste du peuple est du côté de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, du permis et du défendu ; c’est pourquoi il est dit des hommes du peuple : « et du bétail » ; leur nourriture est une « ration de pain d’orge (5) », « et il mesurera six mesures d’orge, qu’il chargera sur elle (6) » : (il s’agit de) la loi orale, des six traités de la Michna ; mais ceux qui sont du côté de l’arbre de vie, qui sont les Hommes, leur Tora est le pain du Saint, béni soit-il, ainsi qu’il est dit : « Venez et mangez de mon pain », c’est-à-dire des deux pains. »
Commentaire :
Les mesures d’orge, offertes pendant la période de l’Omer, c’est la Loi talmudique – la Tora dans son sens extérieur (pechat) – qui provient de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, et qui est la nourriture de la masse du peuple et des rabbins qui la dirigent. Cette masse est semblable à un troupeau, à du bétail.
Les deux pains, offerts à la fête de la Pentecôte, c’est la Loi spirituelle – la Tora dans son sens intérieur (sod), qui émane de l’arbre de vie et qui est la nourriture des kabbalistes, qui seuls sont dignes de porter le nom d’Homme – qui est également le nom de Dieu, car la valeur numérique du nom divin écrit en toutes lettres –Yod Hé Vav Hé – est égale à celle du nom d’Adam, soit 45.
***
Zohar III, 252 b - 253 a, R.M. :
« Le roi dispose de trois sortes de pains ; le pain blanc, fait de la partie interne du blé (germe principalement) ; le pain bis fait de la partie moyenne ; le pain noir, fait avec le son, qui est la partie externe. Le pain blanc, qui constitue sa propre [fin page 30] nourriture, le roi ordonne de le donner à ceux qu’il aime ; c’est l’aliment de l’arbre de la vie ; le pain bis, qui est l’aliment du côté « bien » de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, il ordonne de le donner aux anges, qui lui servent de cavaliers ; et le pain noir, qui est l’aliment du côté « mal » de l’arbre de la connaissance du bien et du mal, il ordonne de le donner aux démons, qui servent de chevaux. Les cavaliers du roi sont aussi les Maîtres de la Loi (Michna), qui sont comme les anges. »
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(1) Ezech. 34, 31. (2) Ps. 81, 24.
(3) Prov. 8. (4) Ezech. 34, 31.
(5) Juges 7, 13. (6) Ruth. 3, 15.
VII – LA LOI EST LA PARTIE EXTÉRIEURE DE LA TORA.
(Référence 6)
Zohar Hadach, Tikounim, 73 b :
« Malheur aux hommes de ce monde, qui ont le cœur et les yeux fermés, car il y a combien de mystères dans la Tora, et ils ne cherchent pas à les voir ; ils ne veulent se nourrir que de la paille de la Tora, qui est son sens extérieur (pechat), son enveloppe, et ils ne désirent pas goûter à sa substance interne. »
***
Tikouné Hazohar, Tikoun 69, 114 a :
« Malheur aux hommes imbéciles, qui ont le cœur bouché et les yeux bandés ; d’eux il est dit : « Ils ont des yeux et ils ne voient pas. (1) » la Lumière de la Tora ; ce sont des bêtes, ils ne voient et ne connaissent que la paille de la Tora, son enveloppe extérieure. Les Sages et les Kabbalistes jettent la paille et l’enveloppe, qui sont à l’extérieur, et ils mangent le grain de blé de la Tora, qui est à l’intérieur. »
Zohar III, 152 a :
« La Tora à un corps : ce sont les Lois, qui sont appelées « le corps de la Tora » (goufétora). Ce corps est revêtu dans des habits, ce sont les récits historiques. Les sots ne regardent que l’habit, qui est la partie historique de la Tora, et là s’arrête leur connaissance, ils ne cherchent pas à voir ce qui est sous l’habit. Ceux qui en savent plus ne regardent pas l’habit, mais seulement le corps qui est sous l’habit. Les Kabbalistes, les serviteurs du Roi Suprême, eux qui étaient présents au mont Sinaï, ne regardent que l’âme, qui est l’essentiel, la Tora proprement dite ; et aux temps messianiques, ils verront l’âme de l’âme de la Tora. »
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(1) Ps. 115, 5.
VIII – LA FONCTION THÉRAPEUTIQUE DE LA LOI
(Référence 7)
Talmud Erouvim, 54 a :
« Souffrez-vous d’une maladie des entrailles ou des os, occupez-vous de l’étude de la Loi, car il est dit : « Ce sera une source de santé pour tes entrailles et un rafraîchissement pour tes os. (1) » Éprouvez-vous des douleurs dans tout le corps, occupez-vous de l’étude de la Loi, car il est dit : « Elles donneront la santé à tout ton corps. (2) »
***
Talmud Berakhoth 5 a :
« Celui qui s’occupe de la Tora éloigne de lui les douleurs. »
***
Midrach Rabba sur Genèse, 44 :
« Les préceptes religieux n’ont été donnés que pour épurer les hommes. »
Un rabbin explique ainsi cet enseignement : « Les lois cérémonielles ne sont d’aucune utilité à Dieu ... Qu’importe à Dieu que nous suivions les pratiques religieuses, que nous lui [fin page 32] offrions des sacrifices, que nous célébrions les fêtes, que nous observions, en un mot, tous les préceptes du culte ? Évidemment le Seigneur peut se passer, pour son compte, de ces actes de soumission ; s’il les a ordonnés, c’est pour notre bien, c’est pour purifier notre âme. » C’est-à-dire que l’observation de la Loi ne fait pas participer l’homme à la vie divine, elle ne le fait accéder tout au plus, qu’au monde des anges (Yetsira) : elle l’élève au-dessus du monde démoniaque (Asia), elle le délivre du royaume du mal, mais elle ne le fait pas pénétrer dans le monde de la Création (Béria) et des Sephiroth (Atsilouth), qui forment le royaume divin. La Loi transforme l’homme animal en ange, mais elle n’en fait pas un Homme, c’est-à-dire un Créateur et un Dieu.
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(1) Prov. 3, 8. (2) Prov. 4, 22.
IX – L’UTILITÉ TEMPORAIRE DE LA LOI.
(Référence 8)
Talmud Sanhédrin, 97 a :
« Le monde a été créé pour la durée de six mille ans. Les deux premiers mille ans forment l’état de tohou, les seconds deux mille ans constituent l’époque de la Loi, et les deux derniers mille ans formeront l’ère messianique. »
Note : nous sommes à la fin du sixième• millénaire (5723).
***
Talmud Maccoth, 24 a :
« Six cent treize commandements furent donnés à Moïse sur le mont Sinaï. Vint David, qui les réduisit à onze : « Éternel, qui séjournera sous ta tente ? Celui qui marche intègre, pratique la justice et dit la vérité de tout son cœur ; qui n’a pas de calomnie sur sa langue, ne fait aucun mal à son semblable, et ne profère point d’outrage contre son prochain ; qui tient pour méprisable quiconque mérite le mépris, mais honore ceux qui craignent l’Éternel ; qui ayant juré à son détriment, ne se [fin page 33] rétracte point ; qui ne place pas son argent à intérêts, et n’accepte pas de présent aux dépens de l’innocent. (1) ». Puis vint Esaïe, qui les réduisit à six : « Qui de nous peut demeurer auprès d’un feu dévorant ? Celui qui marche dans la justice parle avec droiture, refuse le profit de la violence, secoue la main pour repousser les dons, bouche ses oreilles aux propos sanguinaires, ferme les yeux pour ne pas se complaire au mal.(2) » Puis vint Michée, qui les réduisit à trois : « Homme on t’a dit ce qui est bien, ce que l’Éternel demande de toi : rien que de pratiquer la justice, d’aimer la bonté, et de marcher humblement avec ton Dieu.(3) » Et quand vint Amos, il les ramena à un seul : « Ainsi parle l’Éternel : cherchez-moi, et vivez. (4) »
Résumé :
« 613 commandements ont été donnés à Moise au mont Sinai ; David les a réduits à 11 ; Esaïe à 6 ; Michée à 3 ; et Amos à un seul : « Ainsi parle l’Éternel : cherchez-moi et vivez.. »
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(1) Ps. 15. (2) Esaïe 33, 15- 16.
(3) Michée 6, 8. (4) Amos 5, 4•
X – LA TORA COMMENCE LÀ OÙ IL Y A CRÉATION.
(Référence 9)
Talmud Menahot 99 b :
« Le fondement de la Tora, c’est l’abolition de sa Loi. » (Bitoula chel Tora zéhou yesoda.)
Cet enseignement talmudique ne vient pas pour dire, comme certains hérétiques l’ont compris, que « l’accomplissement de la Tora est sa transgression », donc pour justifier le libertinage et l’immoralisme. Le fondement, la base, l’essence de la Tora, c’est la Création : Bérèchith bara Elohim. La Tora divine commence là où il y a Création, donc là où finit la Loi. C’est littéralement conforme à la hiérarchie des mondes selon [fin page 34] la Kabbale. Le monde de la Loi – le monde des anges (Yetsira) – est placé au-dessous du monde de la Création (Beria) et du monde divin (Atsilouth) : le monde de la Création commence – sa base, son fondement – là où finit le monde de la Loi. (Dans une maison, le plancher – la base – du 3e étage apparaît lorsqu’on perce le plafond – le sommet – du 2e étage, lorsqu’on le dépasse.) On découvre le fondement de la Tora, lorsqu’on arrive à la fin de sa Loi – son revêtement. (À la fête de Simhat Tora, on finit de répéter la Loi (Michné Tora, Deutéronome) et l’on commence à lire la Création : Béréchith bara Elohim.)
Mais attention : on peut sortir du monde de la Loi (Yetsira) par deux extrémités, comme on peut quitter le rez-de-chaussée d’une maison soit en montant dans les étages, soit en descendant à la cave : en haut – c’est le monde de la Création et de la Vie Divine (Beria et Atsilouth), en bas – c’est le monde démoniaque (Asia, Sitra Ahara). L’homme qui s’échappe du monde de la Loi divine (monde des êtres moyens) devient soit un Créateur, soit un Démon. Il y a une liberté créatrice – la vraie –, et une liberté démoniaque – la fausse. Pour accéder à la création et à la vie divine (Beria et Atsilouth) il faut passer et s’élever par la Loi (Yetsira), comme pour accéder au 3e étage, il faut d’abord monter au 2e étage. La liberté du monde n’est pas une liberté créatrice – elle est illusoire. C’est celle de la cave. C’est celle de l’existentialisme sartrien et des autres philosophies modernes, comme le marxisme et le gauchisme. Le monde emprisonne l’homme qui se réfugie en lui, et finalement il se retrouve plus enchaîné et plus esclave que dans le monde rabbinique qu’il a fui, plus à l’étroit que dans les ruelles du ghetto et dans les quatre coudées de la Loi. C’est là le drame des faux messianismes juifs : on a affranchi le peuple du joug de la Loi de la Tora, mais on l’a soumis à celui – autrement plus lourd et accablant – des Lois des Nations et des États, gouvernés par les Césars.
XI – LA HALAKHA N’EST DÉJÀ PLUS LA LOI DE MOÏSE.
(Référence 10)
Talmud Berakhoth 19 b :
« Le devoir de respecter la créature humaine est tellement [fin page 35] important, qu’il est permis d’enfreindre un précepte explicitement énoncé dans la Loi sacrée, qui se trouverait en opposition avec lui. »
Je lis dans « Trait-d’Union}) numéro 97 - 98, page 28 :
« On sait que dans certains cas et dans certaines conditions (Yeb. 90 b), les Sages ont autorité pour abolir même un précepte de la Tora. Ainsi, pour éviter qu’on ne soit amené à transgresser l’interdiction de porter le jour du Chabbat, ont-ils supprimé la sonnerie du Chofar lorsque Roch Hachana tombe le Samedi (R. H. 29 b). ( ... )
« Sonner du Chofar, ébranler l’Accusation, c’est accepter un ordre de la Tora, et il n’y aurait rien de particulièrement méritoire à se plier aux exigences de la Tora ; mais ne pas sonner, c’est-à-dire accepter une décision qui n’est que rabbinique, c’est accomplir un acte purement désintéressé ( ... )
« ... Quelle a été l’attitude (d’Abraham) la plus méritoire : était-ce de vouloir immoler son fils comme le lui avait demandé Dieu ? Ou était-ce d’obéir à l’Ange qui – en empêchant le sacrifice – obligeait Abraham à ne pas exécuter l’ordre divin ?
« La leçon qu’il faut tirer d’Abraham est qu’il ne faut pas seulement accepter les ordres que Dieu donne Lui-même mais qu’il convient aussi d’écouter ses messagers, même si leurs exigences semblent contredire la Parole divine. Car c’est Dieu qui a conféré à ses serviteurs fidèles, aux docteurs de la Loi, le pouvoir de légiférer, en nous demandant de ne pas nous détourner de la voie qu’ils nous indiqueront. (Deut XVII, II) »
Note :
Autrement dit : c’est Dieu lui-même qui ordonne de transgresser sa Loi – mais sagement. Dans certaines circonstances, observer la Loi divine, est acte de révolte contre la Parole de Dieu. La Loi se présente donc comme une épreuve pour la liberté de l’homme, comme un examen de son degré de maturité, d’où son caractère pédagogique.
« Abraham le premier a obéi à la Loi orale : ce que lui a dit l’ange avait la même force contraignante que l’ordre qu’il avait reçu directement de Dieu. Personne n’hésiterait à exécuter un ordre divin ; mais Abraham a montré qu’il fallait aussi accepter les ordres de celles des Créatures qui détiennent le Message divin : les Anges, les prophètes, les Sages d’Israël. »
Note :
Remarquons que l’auteur de cet article classe les Sages d’Israël, les Rabbins, avec les Anges, les uns et les autres disposent du pouvoir législatif. Ainsi se confirme du côté rabbinique la thèse de la Kabbala qui assimile les rabbins aux anges, dont leur chef Métatron personnifie la Loi et l’Arbre de la science du bien et du mal, d’où elle émane, et qui gouverne les deux mondes inférieurs (Yetsira et Asia) ; le temps de sa domination est fixé aux six jours de la semaine (qui correspondent aux six traités de la Loi Orale : Michna) et se termine au Septième, le jour du Sabbat, pendant lequel règnent la Chekhina unie au Saint, béni soit-il, et l’Arbre de la Vie, d’où émane la Tora de la Kabbale.
Traduction de Yebamoth, 90 b :
« Vous l’écouterez » : même si le rabbin te dit de transgresser un des commandements de la Tora ... écoute-le. »
XII – LE RABBIN EST UN MÉDECIN.
Que le temps vienne où le monde n’aura plus besoin de lui.
(Référence 11)
Nombres II, 29 :
« Puisse tout le peuple de l’Éternel être composé de prophètes ; et veuille l’Éternel mettre son esprit sur eux. »
***
Joël 2, 28 - 29 :
« Après cela, je répandrai mon esprit sur toute chair ; vos fils et vos filles prophétiseront, vos vieillards auront des songes, et vos jeunes gens des visions. Même sur les serviteurs et sur les servantes, dans ces jours-là, je répandrai mon esprit. »
***
Jérémie 21, 31 - 34 :
« Voici, des jours viennent, dit l’Éternel, où je ferai avec la maison d’Israël et la maison de Juda une alliance nouvelle, non comme l’alliance que je traitai avec leurs pères, le jour où je les ai saisis par la main pour les faire sortir du pays d’Égypte, Alliance qu’ils ont violée, quoique je fusse leur maître, dit l’Éternel. Mais voici l’alliance que je ferai avec la maison d’Israël, après ces jours-là, dit l’Éternel : je mettrai ma Tora au-dedans d’eux, je l’écrirai dans leur cœur ; et je serai leur [fin page 37] Dieu, et ils seront mon peuple. Celui-ci n’enseignera plus son prochain, ni celui-là son frère, en disant : Connaissez l’Éternel ! Car tous me connaîtront, depuis le plus petit jusqu’au plus grand, dit l’Éternel. »
XIII – LE VÉRITABLE KABBALISTE.
(Référence 12)
Zohar Hadach, Tikounim, 63 a - b :
« Il y en a qui se consacrent à l’étude de la Tora pour l’amour de la Chekhina et du Saint, béni soit-il. Ils sont les protecteurs de la Maison d’Étude. Il est dit à leur sujet : « Voici la Tora : lorsqu’un homme meurt. (1) » Les Maîtres ont expliqué ce verset ainsi : « La Tora n’existe que par celui qui se tue pour elle. (2) » c’est-à-dire qui s’appauvrit pour se consacrer à elle – car la mort c’est la pauvreté – et qui vit selon l’enseignement des Pères : « Telle est la voie de la Tora : Tu mangeras du pain avec du sel, tu boiras de l’eau avec mesure, tu coucheras sur la terre, tu mèneras une vie dure en peinant dans l’étude. (3) » Il est dit des hommes qui suivent cette voie : « Tes morts revivront. (4) » Il s’agit de ceux dont il est dit : « Voici la Tora : lorsqu’un homme meurt dans la tente » ; car c’est évidemment par ceux qui se tuent pour la Tora en vivant dans la pauvreté que la Chekhina subsiste. »
***
Zohar III, 124 a :
« Élie dit : « Pasteur fidèle, le moment est venu où je dois monter en haut ; mais je te jure que c’est à cause de ton mérite que Dieu m’a autorisé à me révéler à toi dans ta prison, dans ton tombeau et de te faire du bien, car tu expies les péchés du peuple, ainsi qu’il est écrit : « Il a été brisé par nos crimes. (5) » Le Pasteur fidèle lui répondit : « Je te conjure, au nom de YHVH, de ne pas retarder ton retour, car je souffre ; je me tourne d’un côté et de l’autre, et je ne trouve personne pour m’aider à sortir de ce tombeau, ainsi qu’il est écrit : « Et son tombeau est parmi les méchants. (6) » Je suis méconnu et méprisé, comme une chien mort, parmi les méchants, les Intrus impies qui m’entourent. Car ce sont les descendants des Intrus [fin page 38] qui s’imposent comme bergers d’Israël, à la place du Saint, béni soit-il, dans tous les pays où Israël est répandu. Par contre, les hommes de bien qui craignent le péché sont excommuniés et bannis ; ils errent de ville en ville, et nul n’a pitié d’eux ; on ne leur donne pas même de quoi entretenir leur vie pendant une seule heure ; ils vivent dans la gêne, dans le souci et dans la douleur, et ne sont pas plus considérés que des chiens ; ils ne trouvent pas même où se loger. Quant aux Intrus, ils jouissent des richesses et vivent en paix, sans douleur et sans souci ; ils sont voleurs et corrompus, ce qui ne les empêche pas de s’imposer comme juges et comme dirigeants du peuple ; c’est « à cause d’eux que la terre est remplie de violence » (7), et à leur sujet il est écrit : « Ses oppresseurs sont devenus ses chefs. » (8). Je te conjure, pour la seconde fois, au nom de l’Eternel Cebaoth, le Dieu d’Israël assis au-dessus des Cheroubim, de rapporter toutes mes paroles au Saint, béni soit-il, et de lui exposer notre peine. »
***
Voir aussi André Néher : Chapitre sur le Lévitisme dans l’Essence du Prophétisme, pages 166 à 175 ; et texte dans le cahier spécial de Trait d’Union (n° 81 - 82) consacré au Hassidisme.
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(1) Nombres 19,14 (2) Talmud Bérakhoth 63 b.
(3) Traité des Pères (Avoth 6,4). (4) Esaïe 26,19•
(5) Esaïe 53,5• (6) Esaïe 53,9.
(7) Gen. 6,13• (8) Lam. 1,5.
XIV – MALHEUR AUX RICHES !
Le pauvre est moins tenté par le mauvais penchant.
(Référence 13)
Zohar III, 8b - 9a :
« Si son sacrifice est un holocauste, et s’il est de bœufs ... »
[fin page 39]
(1). Rabbi Yossé demanda : Pourquoi cette répétition dans l’Écriture : « ... S’il est de bœufs », « ... S’il est de moutons », « ... S’il est d’oiseaux », puisque tous reviennent au même ? L’Écriture veut nous apprendre que celui qui peut offrir un holocauste de bœufs, doit l’offrir ; s’il ne le peut pas, il l’offre de moutons, et s’il ne peut encore pas cela, il l’offre d’oiseaux ; car le Saint, béni soit-il, ne demande pas à l’homme une chose impossible. Rabbi Eléazar dit : L’offrande est toujours proportionnée au péché. Le riche qui commet des péchés avec orgueil, est plus coupable et il doit offrir un holocauste de bœufs. L’homme de fortune médiocre offre un holocauste de moutons ; car il est moins orgueilleux. Mais le pauvre, qui n’a point d’orgueil, offre la chose la plus minime, parce que son péché est le plus léger. Le Saint, béni soit-il, pèse les péchés de chacun sur une balance équitable. Rabbi Eléazar demanda à son père Rabbi Siméon : Une tradition nous apprend que la famine vient au monde à cause de trois péchés. Or, tous les péchés ne se trouvent que chez les riches à cause de leur orgueil et ils sont absents chez les pauvres. Où est donc la justice de Dieu qui fait mourir de faim les pauvres et qui laisse vivre les riches, afin qu’ils continuent à pécher ? Rabbi Siméon lui dit : Ta question est judicieuse. Les collègues ont déjà dit que lorsque Dieu veut perdre les coupables il leur donne la paix et comble leurs vœux. Mais, remarque que les coupables ne sont jamais aussi près du Roi suprême que les ustensiles dont il se sert. Et quels sont ces ustensiles ? « Dieu ne méprise jamais un cœur brisé et meurtri. » Et ailleurs : « Je demeurerai près de l’humble et de l’opprimé. » Voilà les ustensiles du Roi. Et, quand la disette et la famine sévissent dans le monde, les pauvres qui en souffrent le plus pleurent et gémissent devant le Roi ; et le Saint, béni soit-il, les rapproche de lui plus près que tous les autres hommes, ainsi qu’il est écrit : « Car il n’a point méprisé ni dédaigné l’humble supplication du pauvre. » (2). Et quand le Saint, béni soit-il, fait sévir la famine dans le monde, malheur aux coupables qui en sont la cause ! Car le Roi prête l’oreille au cri des pauvres. Que Dieu nous préserve du châtiment et de la honte qui attendent ces coupables ! C’est pourquoi l’Écriture dit :
« J’entendrai, j’entendrai encore une fois ses cris. » (3). J’entendrai d’abord pour soulager la souffrance des pauvres, et j’entendrai ensuite pour châtier les riches qui en sont la [fin page 40] cause. Aussi, à l’époque où sévit la famine dans le monde, il convient de dire : Malheur aux riches ! Car Dieu entendra les cris des pauvres. Remarquez que le sacrifice exigé du pauvre est réduit à un minimum, parce qu’il a déjà le cœur brisé ; et, bien qu’il ait eu l’intention de pécher, Dieu la lui pardonne en raison de ses prières et des peines des membres de sa maison. »
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(1) Lévit., 1,3. (2) Ps 51,19, et 22,25.
(3) Exode, 22,22.
CONCLUSION
La Halakha, c’est déjà la Kabbala. On ne découvre pas le monde de la Kabbala en refusant d’entrer dans le monde de la Halakha. C’est au contraire en pénétrant dans les profondeurs du monde de la Halakha que les fondements du monde de la Kabbala apparaissent. Suivre jusqu’au bout la Halakha, c’est le plus sûr moyen d’arriver à la Kabbala. Mais la Halakha n’est pas le but – le monde de la création et la participation à la vie divine – : elle indique « la marche à suivre ». Les rabbins anti-kabbalistes, ce sont les pasteurs qui refusent de voir le but et qui se condamnent à marcher et à errer éternellement avec leurs troupeaux dans les lieux arides. C’est-à-dire à produire des Halakhoth sans fin.
« Ils n’entreront pas dans la terre d’Israël » où coulent le lait et le miel. Ils appartiennent à la classe des esclaves attachés à l’arbre de la science du bien et du mal, et dont le Zohar dit : « Ils ne se passeront jamais de la Loi qui interdit et qui autorise, qui édicte ce qui est impur et ce qui est pur. La Michna sera toujours valable pour eux, car ils ne goûteront jamais de l’arbre de la vie. » (1).
Ils font partie du Erev Rav, des Intrus, qui ne sont pas de véritables Israélites et qui sont comparables à des bêtes. (2). Le Zohar déclare à leur sujet : « Le jour où les âmes de ces hommes seront exterminées sera aussi solennel que le jour où le Saint, béni soit-il, créa le ciel et la terre, ainsi qu’il est écrit : « Au jour où Dieu créa la terre et le ciel. .. » À cette époque, le Saint, béni soit-il, s’unira à la Chekhina et le monde sera renouvelé, ainsi qu’il est écrit : « Car comme les cieux nouveaux et la terre nouvelle que je vais créer subsisteront toujours devant moi, dit l’Éterne1. .. » (…) Mais avant l’exter- [fin page 43] mination de ces âmes qui se sont introduites parmi les Israélites, la pluie de la doctrine ésotérique ne tombera pas sur Israël, et Israël qui est comparé aux plantes et aux arbres ne poussera pas. » (3).
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(1) Zohar III, 125 a, R.M. (2) Idem.
(3) Zohar 1, 25 b.
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