Panagiotis
Christou
Π. Κ Χρήστου, Θεολογικά Μελετήματα 2, Γραμματεία του Δ' αιώνος, Θεσσαλονίκη, 1975.
1. Les Pneumatomaques.
Pendant la première phase de la controverse arienne, les théologiens s'etaient exclusivement préoccupés du problème de la situation du Fils dans la Trinité. Et bien qu'il fût evident qu'en niant la divinité de natιιre du Fils, les Ariens nieraient bien davantage la divinité de l' Esprit, les adhérents du dogme de Nicée prirent la peine de combattre sur le front οù l'attaque était la plus grave. La pneumatomachie a faît son apparition lorsqu'οn distingua des groupes de tendances variées dans le camp des Ariens, en particulier quand certains d'entre eux commencèrent à admettre la divinité du Fils, ainsi que la formule homoousios, mais en périphrase.
Comme premiers pneumatomaques, apparaissent vers 360, les Tropicistes d'Egypte et les Anoméens d'Asie mineure. Ces derniers cependant avaient une même opinion humble du Fils et de l'Esprit. Les pneumatomaques irréductibles s'allient dès 370 en une faction particulière dirigée par Eustathe de Sébaste et qui unit les Homéens et les Hοméousiens. Ce sont ces gens-là qu'on appelle proprement les Ρneumαtοmaques, parce que par rapport aux Anoméens, ils οnt une conception plus élevée du Fils.
Saint Basile avait tendance à suppοser que les Pneumatomaques, lorsqu'ils cherchaient à diminuer la position éminente de l'Esprit, étaient conduits par des présuppositions logiques. Mais en réalité, divers motifs déterminaient leur manière de penser. Tout d'abord, l'absence d'une mention explicite de la divinité de l'Esprit dans la Bible, donne l'impression que les partisans de la divinité de l'Esprit introduiseut dans l'Eglise une divinité qui n'y est pas attestée et qui est, par conséquent, inacceptable. Εn second lieu, la conception de la transcendance absolue de Dieu exclut aussi la divinité de l'Esprit, et ses interventions dans les hommes et dans le monde. Troisiemement, la conception logique veut, que si l'Esprit est aussi Dieu, nous sombrons dans le trithéisme.
Ceux qui nient la divinité de l'Esprit purront répondre à la question: "Qu'est exactement l'Esprit?" de la même manière que les monarchianistes dynamiques pour qui l'Esprit n'est pas une personne, mais simplement une puissance (dynamis); saint Basile n'est pas confronté avec cette réponse. Davantage, ils peuvent aussi répondre que c'est une personne, mais qu'elle n'est pas divine. Ceux qui répondent ainsi partent du principe que les êtres existent soit comme inengendrés, comme Dieu, soit comme engendrés, comme le Fils, soit enfin, comme créatures. L'Esprit, n'appartenant ni à la première ni à la seconde de ces catégories, est nécessairement rangé parmi les creatures. Toutefois, en face des objections des orthodoxes, ils ont trouvé une position entre Dieu et la créature, de manière à situer l'Esprit au niveau d'un être à demi divin<1>. Autrement dit, l'Esprit n'est pas un serviteur, comme c'est le cas des êtres créés, et il n'est pas non plus un seigneur comme l'est Dieu: plutôt il est une troisième réalité, indépendante<2>. Ils ont formulé cette οpinion théologiquement et liturgiquement en assignant au Ρère, cοmme créateur le ex hou (de quel), au Fils, cοmme serviteur, le di' hοu (par lequel) et à l'Esprit, en tant qu' il renferme en lui-même le temps et l'espace, le en hô (en qui)<3>.
Un troisième groupe, sans considérer l'Esprit cοmme Dieu, le caractérise comme divin, mais le subοrdοnne en le plaçant à la troisième place après le Père et le Fils<4>.
Π. Κ Χρήστου, Θεολογικά Μελετήματα 2, Γραμματεία του Δ' αιώνος, Θεσσαλονίκη, 1975.
1. Les Pneumatomaques.
Pendant la première phase de la controverse arienne, les théologiens s'etaient exclusivement préoccupés du problème de la situation du Fils dans la Trinité. Et bien qu'il fût evident qu'en niant la divinité de natιιre du Fils, les Ariens nieraient bien davantage la divinité de l' Esprit, les adhérents du dogme de Nicée prirent la peine de combattre sur le front οù l'attaque était la plus grave. La pneumatomachie a faît son apparition lorsqu'οn distingua des groupes de tendances variées dans le camp des Ariens, en particulier quand certains d'entre eux commencèrent à admettre la divinité du Fils, ainsi que la formule homoousios, mais en périphrase.
Comme premiers pneumatomaques, apparaissent vers 360, les Tropicistes d'Egypte et les Anoméens d'Asie mineure. Ces derniers cependant avaient une même opinion humble du Fils et de l'Esprit. Les pneumatomaques irréductibles s'allient dès 370 en une faction particulière dirigée par Eustathe de Sébaste et qui unit les Homéens et les Hοméousiens. Ce sont ces gens-là qu'on appelle proprement les Ρneumαtοmaques, parce que par rapport aux Anoméens, ils οnt une conception plus élevée du Fils.
Saint Basile avait tendance à suppοser que les Pneumatomaques, lorsqu'ils cherchaient à diminuer la position éminente de l'Esprit, étaient conduits par des présuppositions logiques. Mais en réalité, divers motifs déterminaient leur manière de penser. Tout d'abord, l'absence d'une mention explicite de la divinité de l'Esprit dans la Bible, donne l'impression que les partisans de la divinité de l'Esprit introduiseut dans l'Eglise une divinité qui n'y est pas attestée et qui est, par conséquent, inacceptable. Εn second lieu, la conception de la transcendance absolue de Dieu exclut aussi la divinité de l'Esprit, et ses interventions dans les hommes et dans le monde. Troisiemement, la conception logique veut, que si l'Esprit est aussi Dieu, nous sombrons dans le trithéisme.
Ceux qui nient la divinité de l'Esprit purront répondre à la question: "Qu'est exactement l'Esprit?" de la même manière que les monarchianistes dynamiques pour qui l'Esprit n'est pas une personne, mais simplement une puissance (dynamis); saint Basile n'est pas confronté avec cette réponse. Davantage, ils peuvent aussi répondre que c'est une personne, mais qu'elle n'est pas divine. Ceux qui répondent ainsi partent du principe que les êtres existent soit comme inengendrés, comme Dieu, soit comme engendrés, comme le Fils, soit enfin, comme créatures. L'Esprit, n'appartenant ni à la première ni à la seconde de ces catégories, est nécessairement rangé parmi les creatures. Toutefois, en face des objections des orthodoxes, ils ont trouvé une position entre Dieu et la créature, de manière à situer l'Esprit au niveau d'un être à demi divin<1>. Autrement dit, l'Esprit n'est pas un serviteur, comme c'est le cas des êtres créés, et il n'est pas non plus un seigneur comme l'est Dieu: plutôt il est une troisième réalité, indépendante<2>. Ils ont formulé cette οpinion théologiquement et liturgiquement en assignant au Ρère, cοmme créateur le ex hou (de quel), au Fils, cοmme serviteur, le di' hοu (par lequel) et à l'Esprit, en tant qu' il renferme en lui-même le temps et l'espace, le en hô (en qui)<3>.
Un troisième groupe, sans considérer l'Esprit cοmme Dieu, le caractérise comme divin, mais le subοrdοnne en le plaçant à la troisième place après le Père et le Fils<4>.
NOTES
* Ρubliée dans Etudes Patristiques: Le traité sur le Saint Ésprit de Saint Basile, Verbum Caro vοl. ΧΧΙ1 (Νo 88), pp. 158-171.
1. SOCRATE, Hist. eccl., 2, 45; PG 67, 360.
2. De Spir. Sancto, Chap. 20, 5l; ΡG 32, 161.
3. Chap. 2, 4; PGf 32, 73.
4. Chap. 6, 13; PG 32, 88.
2. Les sources de saint
Basile concernant la doctrine du Saint-Esprit.
Du côté orthodoxe, les premiers hommes qui ont abordé le problème du Saint Esprit. de rnanière spécifique, au cours de cette période, sont Athanase le Grand et Didyme l'Aveugle. Les écrits authentiqιιes de Didyme sur ce probleme apparaissent plus tard que l'an 360 et tiennent par conséquent compte des sectes pnematomaques plus tardives. Toutefois, même s'ils se sont répandus après 381, ils comportent probablement, des matériaux qu' il a enseignés plus tôt à l'école théologique d'Alexandrie. Tant Grégoire le Théologien que Basile le Grand connaissaient probablement ses opinions sur l'Esprit avant leur publication dans ses écrits, parce qu'ils avaient vraisemblablement suivi ses cours. Cela explique en partie la similitude de leurs démonstrations par rapport aux preuves de leur maître alexandrin.
Basile a consacré à ce problème un écrit special. De Spiritu Sancto ad Amphilochium, qui justifie la forme symetrique de doxologie (Gloire au Père et au Fils et au Saint Esprit) employée couramment avec la formule asymétrique dominante (Gloire au Père, par le Fils dans le Saint-Esprit) et qui présente un enseignement, d'ensemble sιιr l'Esprit. La doctrine de Basile est également complétée par ce qu'il dit dans le troisième livre de son ouvrage contre Eunome, le traité Contra Sabelliuum, Arium et Anοmοiοs et dans quelquesunes de ses Lettres.
Cοmme tοιιs les orthodoxes, Basile a été accusé par les hérétiques d'être un novateur en reconnaissant la divinité de l'Esprit. Davantage, il a aussi été accusé avec virulence d'introduire une nouvelle fοrme symétrique de doxologie. Εn se defendant contre cette accusation, Basile a été absolument sincère, car il était parfaitement certain que sa pneumatologie découlait directement de la tradition et de la vie de l'Eglίse: "Comment serais-je un novateur, un createur de nouvelles formules, alors qιιe je cite comme auteurs et comme champions de la Parole, des nations entières, des villes, des ιιsages qui remontent, au-delà de toute mémoire humaine, des hommes qui ont été les piliers de l' Eglise et qui ont été illustres par leurs connaissances et leur puissance spirituelle?"<5>.
Dans le Nouveau Testament, Basile ne trouvait pas seulement la formule baptismale trinitaire dans laquelle la persοnnalité et la divinité de l'Esprit, étaient librement, signifiées -- parce qu'il est placé à côté des formules pauliniennes qui ont trait à l'Esprit<6>, il trouvait des noms comme "paraclet, saint, oint, Seigneur, Dieu" qui temoignent de la communion<7> avec Dieu et des énergies de l'Esprit qui ne conviennent qu'à Dieu, comme la connaissance des profondeurs de Dieu, par example<8>.
Basile ne ce contente pas de la simple citation de l'Ecriture, car ses adversaires aussi invoquent son autorité. La défense d'une doctine par l' appel à la tradition s'imposait plus qu'à aucune autre époque. Antérieurement, les discussions dogmatiques s'etaient limitées au Père et auFils au sujet desquels il y avait d'abondants témoignages scripturaires; tandis que lorsque l'intérêt se concentra sur l'Esprit, les témoignages scripturaires étaient insuffisants.
D'après Basile, toute la tradition de l'Eglise, qui avait une valeur égale à celle de l'Ecriture -parce qu'elle exprime son esprit<9>- explicite la divinité de l'Esprit: "Ne séparez pas l'Esprit Saint du Père et du Fils; révérez la tradition. C'est de cette manière que le Seigneur a enseigné, que les apôtres ont prêché, que les Pères ont conservé et les martyrs confirmé"<10>. Parmi les Pères, Basile mentionne le nom d'Irénée, de Clément d'Alexandrie, de Denys de Rome et de Denys d'Alexandrie, d' Origène, de Grégoire le Thaumaturge et d' "Athénogène" comme témoins de la tradition kérygmatique connue au sujet de la doctrine du Saint-Esprit comme personne divine<11>.
Cependant, Basile insiste davantage sur la tradition dogmatique non écrite. Selon ses vues, qui coincident à un haut degré avec le point de vue de l' école ancienne d'Alexandrie, les apôtres et les Pères ont conserv une partie de la vérité cachée dans les sacrements et les rites en général: "Le dogme est une chose et le kérygme en est une autre. Si le premier est conservé dans le silence, le second est proclamé"<12>. Le kerygme contenu dans les Ecritures et dans les écrits des Pères est transmis aux membres de l' Eglise et à ceux du dehors par la prédication. Le dogme ne contredit pas le kerygme; il en est l'interprétation et en donne une intelligence plus profonde, mais il n'est pas formulé. C'est une expérience vivante des vérités de fois dans la vie générale et sacramentelle de l'Eglise. Ainsi compris, le dogme ne fait, pas partie d'une tradition, secrète, cachée à l grande masse des fidèles, car il est, la propriété commune de tous ceux qui participent à la vie de l' Eglise -, même s'il y eut une certaine dissimulation à travers les siècles, dissimulation accentuée par la lecture secrète des prières liturgiques et par l'érection de l'iconostase pour dissimιιler la table sainte. En tout cas, les Ecritures, l'enseignement, des Pères, la confession de la foi, les sacrements et le culte en général constituent des parties liées dont toute formulation sur un sujet spécifique doit tenir compte; "Nous devons être baptisés et glorifier le Père, le Fils et lw Saint-Esprit, comme nous le croyons"<13>. Pour la première fois, le culte d'adoration qui se déroule dans un lieu défendu devenait un moyen de défense.
Ιl y a deux moyens de nous conduire au salut: la foi et le baptême. Le premier est attesté par la confession unifiée du Père, du Fils et du Saint-Esprit que le baptisé<14> faisait et qui est justement l'ancêtre de la doxologie trinitaire symétrique<15>. Ceux qui nient l'Esprit trangressent naturellement toute la confession de foi, parce que tout baptisé doit ou assumer la foi entière ou renoncer au nom de chrétien<16>. Le second moyen de salut, le baptême, est également donné au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit<17>. Le baptême poursuit deux buts: la mort du corps du péché, accomplie par l'immersion et la réception de la vie nouvelle suscitée par l'Esprit de vie<18>. Ceux qui séparent l'Esprit du Père et du Fils rendent d'une part le baptême incomplet et font d' autre part de la confession de foi une réalité inadéquate<19>. Ιl est assurément impossible d'être baptisé en même temps au nom de deux êtres divins et d'un être créé<20>.
De ces extraits, il ressort clairement que Basile attachait une très grande importance à l'expérience pneumatologique du clιrétien. Cette expérience commence avec la participation du chrétien au sacrement du baptême. Les besoins spirituels des chrétiens êxigent la divinité de l'Esprit et leur expérience le confirme. Si l' Esprit était une creature, la doctrine de la Trinité et la possibilité d'une déification de l'homme seraient détruites. La conséquence serait que toute la structure de l'Eglise s'effondrerait. C'est pourquoi Grégoire le Theologien s'ecrie: "Si le Saint-Esprit n'est pas Dieu, qu'il le devienne d'abord et qu'ensuite il me déifie comme son égal"<21>.
Du côté orthodoxe, les premiers hommes qui ont abordé le problème du Saint Esprit. de rnanière spécifique, au cours de cette période, sont Athanase le Grand et Didyme l'Aveugle. Les écrits authentiqιιes de Didyme sur ce probleme apparaissent plus tard que l'an 360 et tiennent par conséquent compte des sectes pnematomaques plus tardives. Toutefois, même s'ils se sont répandus après 381, ils comportent probablement, des matériaux qu' il a enseignés plus tôt à l'école théologique d'Alexandrie. Tant Grégoire le Théologien que Basile le Grand connaissaient probablement ses opinions sur l'Esprit avant leur publication dans ses écrits, parce qu'ils avaient vraisemblablement suivi ses cours. Cela explique en partie la similitude de leurs démonstrations par rapport aux preuves de leur maître alexandrin.
Basile a consacré à ce problème un écrit special. De Spiritu Sancto ad Amphilochium, qui justifie la forme symetrique de doxologie (Gloire au Père et au Fils et au Saint Esprit) employée couramment avec la formule asymétrique dominante (Gloire au Père, par le Fils dans le Saint-Esprit) et qui présente un enseignement, d'ensemble sιιr l'Esprit. La doctrine de Basile est également complétée par ce qu'il dit dans le troisième livre de son ouvrage contre Eunome, le traité Contra Sabelliuum, Arium et Anοmοiοs et dans quelquesunes de ses Lettres.
Cοmme tοιιs les orthodoxes, Basile a été accusé par les hérétiques d'être un novateur en reconnaissant la divinité de l'Esprit. Davantage, il a aussi été accusé avec virulence d'introduire une nouvelle fοrme symétrique de doxologie. Εn se defendant contre cette accusation, Basile a été absolument sincère, car il était parfaitement certain que sa pneumatologie découlait directement de la tradition et de la vie de l'Eglίse: "Comment serais-je un novateur, un createur de nouvelles formules, alors qιιe je cite comme auteurs et comme champions de la Parole, des nations entières, des villes, des ιιsages qui remontent, au-delà de toute mémoire humaine, des hommes qui ont été les piliers de l' Eglise et qui ont été illustres par leurs connaissances et leur puissance spirituelle?"<5>.
Dans le Nouveau Testament, Basile ne trouvait pas seulement la formule baptismale trinitaire dans laquelle la persοnnalité et la divinité de l'Esprit, étaient librement, signifiées -- parce qu'il est placé à côté des formules pauliniennes qui ont trait à l'Esprit<6>, il trouvait des noms comme "paraclet, saint, oint, Seigneur, Dieu" qui temoignent de la communion<7> avec Dieu et des énergies de l'Esprit qui ne conviennent qu'à Dieu, comme la connaissance des profondeurs de Dieu, par example<8>.
Basile ne ce contente pas de la simple citation de l'Ecriture, car ses adversaires aussi invoquent son autorité. La défense d'une doctine par l' appel à la tradition s'imposait plus qu'à aucune autre époque. Antérieurement, les discussions dogmatiques s'etaient limitées au Père et auFils au sujet desquels il y avait d'abondants témoignages scripturaires; tandis que lorsque l'intérêt se concentra sur l'Esprit, les témoignages scripturaires étaient insuffisants.
D'après Basile, toute la tradition de l'Eglise, qui avait une valeur égale à celle de l'Ecriture -parce qu'elle exprime son esprit<9>- explicite la divinité de l'Esprit: "Ne séparez pas l'Esprit Saint du Père et du Fils; révérez la tradition. C'est de cette manière que le Seigneur a enseigné, que les apôtres ont prêché, que les Pères ont conservé et les martyrs confirmé"<10>. Parmi les Pères, Basile mentionne le nom d'Irénée, de Clément d'Alexandrie, de Denys de Rome et de Denys d'Alexandrie, d' Origène, de Grégoire le Thaumaturge et d' "Athénogène" comme témoins de la tradition kérygmatique connue au sujet de la doctrine du Saint-Esprit comme personne divine<11>.
Cependant, Basile insiste davantage sur la tradition dogmatique non écrite. Selon ses vues, qui coincident à un haut degré avec le point de vue de l' école ancienne d'Alexandrie, les apôtres et les Pères ont conserv une partie de la vérité cachée dans les sacrements et les rites en général: "Le dogme est une chose et le kérygme en est une autre. Si le premier est conservé dans le silence, le second est proclamé"<12>. Le kerygme contenu dans les Ecritures et dans les écrits des Pères est transmis aux membres de l' Eglise et à ceux du dehors par la prédication. Le dogme ne contredit pas le kerygme; il en est l'interprétation et en donne une intelligence plus profonde, mais il n'est pas formulé. C'est une expérience vivante des vérités de fois dans la vie générale et sacramentelle de l'Eglise. Ainsi compris, le dogme ne fait, pas partie d'une tradition, secrète, cachée à l grande masse des fidèles, car il est, la propriété commune de tous ceux qui participent à la vie de l' Eglise -, même s'il y eut une certaine dissimulation à travers les siècles, dissimulation accentuée par la lecture secrète des prières liturgiques et par l'érection de l'iconostase pour dissimιιler la table sainte. En tout cas, les Ecritures, l'enseignement, des Pères, la confession de la foi, les sacrements et le culte en général constituent des parties liées dont toute formulation sur un sujet spécifique doit tenir compte; "Nous devons être baptisés et glorifier le Père, le Fils et lw Saint-Esprit, comme nous le croyons"<13>. Pour la première fois, le culte d'adoration qui se déroule dans un lieu défendu devenait un moyen de défense.
Ιl y a deux moyens de nous conduire au salut: la foi et le baptême. Le premier est attesté par la confession unifiée du Père, du Fils et du Saint-Esprit que le baptisé<14> faisait et qui est justement l'ancêtre de la doxologie trinitaire symétrique<15>. Ceux qui nient l'Esprit trangressent naturellement toute la confession de foi, parce que tout baptisé doit ou assumer la foi entière ou renoncer au nom de chrétien<16>. Le second moyen de salut, le baptême, est également donné au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit<17>. Le baptême poursuit deux buts: la mort du corps du péché, accomplie par l'immersion et la réception de la vie nouvelle suscitée par l'Esprit de vie<18>. Ceux qui séparent l'Esprit du Père et du Fils rendent d'une part le baptême incomplet et font d' autre part de la confession de foi une réalité inadéquate<19>. Ιl est assurément impossible d'être baptisé en même temps au nom de deux êtres divins et d'un être créé<20>.
De ces extraits, il ressort clairement que Basile attachait une très grande importance à l'expérience pneumatologique du clιrétien. Cette expérience commence avec la participation du chrétien au sacrement du baptême. Les besoins spirituels des chrétiens êxigent la divinité de l'Esprit et leur expérience le confirme. Si l' Esprit était une creature, la doctrine de la Trinité et la possibilité d'une déification de l'homme seraient détruites. La conséquence serait que toute la structure de l'Eglise s'effondrerait. C'est pourquoi Grégoire le Theologien s'ecrie: "Si le Saint-Esprit n'est pas Dieu, qu'il le devienne d'abord et qu'ensuite il me déifie comme son égal"<21>.
NOTES
* Ρubliée dans Etudes Patristiques: Le traité sur le Saint Ésprit de Saint Basile, Verbum Caro vοl. ΧΧΙ1 (Νo 88), pp. 158-171.
5. Chap. 29, 75; PG 32, 208 C.
6. 2 Cor. 13, 13. Chap. 25, 59; PG 32. 177.
7. Contra Eun. 3, 3. ΡG 29, 661.De Spir, Sancto 24, 52; ΡG 32, 164.
8. Chap. 24, 56; ΡG 32, 172.
9. - Chap. 7, 16; ΡG 32, 93.
10. Contra Sab. et Ar. et Anom. 6; PG 31, 612 B.
11. De Spir. Sancto,chap. 29, 72; ΡG 32, 201-208.
12. Chap. 27, 66; PG 32, 189.
13. Epist. 125, 3; PG 32, 549.
14. De Spir. Sancto,chap. 10, 26; PG 32, 113.
15. Chap. 27, 68; PG 32, 193.
16. Chap. 11, 27; PG 32, 113-116.
17. Chap. 12, 28; PG 32, 117.
18. Chap. 15, 35; PG 32, 129.
19. Contra Sab. et Ar. et Αnοm. 5; ΡG 31, 609.
20. Epist. 125, 3; ΡG 32, 549.
21. Sermo 34, 12; ΡG 36, 252.
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3. Le double aspect de
la doctrine du Saint-Esprit.
Tout ce qui concerne Dieu demeure hors d'atteinte;de l'esprit humain. Εn effet, Dieu participe d'une sphère d'existence dans laquelle l'homme ne peut pénétrer. Toute connaissance religieuse serait restée impossible à moins qu'il y ait eu révélation. Saint Basile réfute les principes fondamentaux de l'enseignement des Pneumatomaques et des Ariens, l' impossibilité naturelle pour Dieu d'entrer dans la sphère humaine, par certaines distinctions qui joueront un rôle important dans les discussions théologiques dix sèecles plus tard.Si l'homme ne peut entrer par lui-même dans le domaine de Dieu, Dieu peut entrer dans le domaine du monde qui est sa propre création. Dieu y pénètre par sa révélation; qui est la manifestation de sa propre personne dans le monde, par l'entremise de ses énergies. Si nous ignorons Dieu dans son essence inaccessible, nous le connaissons à travers ses énérgies qui descendent jusqu' à nous<22>. Les énergies que nous sentons au moyen de notre sens spirituel, contribuent à la formation d'une sorte de connaissance empirique à l'egard des hypostases de la Trinité.
Ainsi la doctrine du Saint-Esprit peut se rapporter soit à son existence éternelle, soit à son activité dans le monde: Dans le premier cas, l'Esprit est situé à côté du Père et du Fils; dans le second, il'est aussi avec les hommes: "Lorsque nous considérons l'Esprit, nous le voyons exalté avec le Père et le Fils; quand nous évoquons la grâce communiquée à ses participants, nous voyons que le Saint- Esprit est en nous"<23>. Ροιιr ces raisons, les prépositions sun (avec) et en (en) sont interchangeables; ainsi, les formes doxologiques sont toιιtes deux correctes: la symétrique exprime la place de l'Esprit dans la Trinité et l'asymétrique exprime son activité dans l'économie divine.
Dans sa théologie de l'Esprit, saint Basile -comme Athanase dans sa théologie du Fils - part de ce second aspect. Οù pouvons-nous situer l'Esprit? Les hérétiques ont suivi le schéma "nonengendré, engendré, créé". Mais saint Basile réfute ce schéma en affirmant que ces catégories ne s'appliquent pas à l'Esprit, car il est l' "Esprit Saint", un nom qui exprime toutes choses. Ι1 y a une ligne de séparation entre Dieu et la création, et l'Esprit doit être situé dans l'une des deux zones: "Dans les coιιples des noms de Dieu -création, Seigneurie- esclavage, énergie sanctifiante et êtres sanctifiés, de quel côté placer l'Esprit?"<24>. Ιl est certainement impossible à celui qui sanctifie et à celui qui a besoin d'être sanctifié, si celui qui enseigne et à celui qui est enseigné, à celui qιιi réνèle et à celui qui a besoin d'une réνélatiοn, d'être de même nature<25>. La création est esclave, tandis qιιe l'Esprit libère la personnalité humaine et la rend parfaite; οn ne peut donc le concevoir que comme natιιre divine. Νul ne peut concevoir la sanetification et la perfection par des moyens créés.
Dans le mouvement hésychaste du XIVe siecle, nous rencontrons une fois de plus les mêmes arguments, cette fois plus développés. Les hésychastes, contestant la possibilité d'une régenération et d'une déification de l'homme par des moyens créés, les attribuent à l'énergie incréée et naturelle de l'Esprit seul.
Tout ce qui concerne Dieu demeure hors d'atteinte;de l'esprit humain. Εn effet, Dieu participe d'une sphère d'existence dans laquelle l'homme ne peut pénétrer. Toute connaissance religieuse serait restée impossible à moins qu'il y ait eu révélation. Saint Basile réfute les principes fondamentaux de l'enseignement des Pneumatomaques et des Ariens, l' impossibilité naturelle pour Dieu d'entrer dans la sphère humaine, par certaines distinctions qui joueront un rôle important dans les discussions théologiques dix sèecles plus tard.Si l'homme ne peut entrer par lui-même dans le domaine de Dieu, Dieu peut entrer dans le domaine du monde qui est sa propre création. Dieu y pénètre par sa révélation; qui est la manifestation de sa propre personne dans le monde, par l'entremise de ses énergies. Si nous ignorons Dieu dans son essence inaccessible, nous le connaissons à travers ses énérgies qui descendent jusqu' à nous<22>. Les énergies que nous sentons au moyen de notre sens spirituel, contribuent à la formation d'une sorte de connaissance empirique à l'egard des hypostases de la Trinité.
Ainsi la doctrine du Saint-Esprit peut se rapporter soit à son existence éternelle, soit à son activité dans le monde: Dans le premier cas, l'Esprit est situé à côté du Père et du Fils; dans le second, il'est aussi avec les hommes: "Lorsque nous considérons l'Esprit, nous le voyons exalté avec le Père et le Fils; quand nous évoquons la grâce communiquée à ses participants, nous voyons que le Saint- Esprit est en nous"<23>. Ροιιr ces raisons, les prépositions sun (avec) et en (en) sont interchangeables; ainsi, les formes doxologiques sont toιιtes deux correctes: la symétrique exprime la place de l'Esprit dans la Trinité et l'asymétrique exprime son activité dans l'économie divine.
Dans sa théologie de l'Esprit, saint Basile -comme Athanase dans sa théologie du Fils - part de ce second aspect. Οù pouvons-nous situer l'Esprit? Les hérétiques ont suivi le schéma "nonengendré, engendré, créé". Mais saint Basile réfute ce schéma en affirmant que ces catégories ne s'appliquent pas à l'Esprit, car il est l' "Esprit Saint", un nom qui exprime toutes choses. Ι1 y a une ligne de séparation entre Dieu et la création, et l'Esprit doit être situé dans l'une des deux zones: "Dans les coιιples des noms de Dieu -création, Seigneurie- esclavage, énergie sanctifiante et êtres sanctifiés, de quel côté placer l'Esprit?"<24>. Ιl est certainement impossible à celui qui sanctifie et à celui qui a besoin d'être sanctifié, si celui qui enseigne et à celui qui est enseigné, à celui qιιi réνèle et à celui qui a besoin d'une réνélatiοn, d'être de même nature<25>. La création est esclave, tandis qιιe l'Esprit libère la personnalité humaine et la rend parfaite; οn ne peut donc le concevoir que comme natιιre divine. Νul ne peut concevoir la sanetification et la perfection par des moyens créés.
Dans le mouvement hésychaste du XIVe siecle, nous rencontrons une fois de plus les mêmes arguments, cette fois plus développés. Les hésychastes, contestant la possibilité d'une régenération et d'une déification de l'homme par des moyens créés, les attribuent à l'énergie incréée et naturelle de l'Esprit seul.
NOTES
* Ρubliée dans Etudes Patristiques: Le traité sur le Saint Ésprit de Saint Basile, Verbum Caro vοl. ΧΧΙ1 (Νo 88), pp. 158-171.
22. Epist. 234, 1; PG 32, 869. Loeb, 3, p. 370-2.
23. De Spir. Sancto, chap. 26, 63; ΡG; 32, 184.
24. Contra Εun. 3, 2; ΡG 29, 660.
25. Ibid. 3, 6; PG 29, 668.
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Saint Basile, comme beaucoup d'autres Pères grecs de la même époque, ramène la théologie à une triadologie, et il ne développe pas la triadologie comme un produit de la pensée philosophique, mais comme une vérité empirique. Ιl part des hypostases concrètes, actives dans le monde pour aboutir à l'unité de Dieu.
Les hypostases divines se manifestent de diverses manières et en divers lieux, mais elles sοnt apparues dans des activités particulières d'une manière plus totale; le Père dans la création, le Fils dans l'oeuvre de la régénération et l'Esprit dans la vie de l' Eglise. Le Fils et l'Esprit sont venus dans le monde en un sens réel. Certains Pères, comme Cyrille de Jerusalem<26> l et Grégoire le Théologien<27> par exemple, parlent de la venue ,ou de l'incarnation de l'Esprit. Basile parle aussi de la descente et de la demeure en l'homme de l'Esprit, bien qu'il n'use pas du même vocabulaire.
La causalité provoque en Dieu la distinction des personnes qui occupent une certaine place dans la Trinité. Le Père est non-engendré, le Fils est engendré et l' Esprit procède<28>; leurs attributs distinctifs correspondants sont la paternité, la filialité et la sanctification<29>. Mais tandis que le terme de gennasthai exprime globalement un mode de dérivation de manière compréhensible, il n'en est pas de même du mot ekporeuesthai car ce terme ne dé peint pas précisément l'origine de l'Esprit. C'est la raison pour laquelle saint Basile affirme que l'Esprit procède de manière ineffable<30> du Père; la procession désigne la familiarité et préserve une mode d'existence inexprimable; mais il ne doute jamais de la personnalité de l'Esprit.
Α aucune époque, les Pères, quels qu'ils soient, n'ont déclaré que l'Esprit procède aussi du Fils. Certains passages de Cyrille d'Alexandrie, parlant de la dérivation de l'Esprit du Fils, font allusion, non à la cause, mais à sa mission; la Trinité entière participe à sa mission par une énergie commune, parce que toutes les énergies divines sent communes à l'ensemble de la Tritιité: Le fait que les deux hypostases derivent du Père seul crée l' impression facile à dissiper de la monarchie de l' hypostase du Pére. Mais les propriétés du Fils et de l'Esprit ne sont certainement pas considérées comme inférieures à celles du Père; elles ne sont en effet distinguées qu'en rapport avec la cause qui doit rester rigoureusement unique pοιιr éviter tout dualisιne, mais elles ne le sont pas par rapport à la nature incrééee. Les hypostases ne sont pas première, seconde, troisiéme, elles sont d'egale valeur -et non numérotées- et elles sont désignées par leιιr nom saint: ιιn seul Dieu, le Père,.un seul engendré, le Fils, un seul Saint-Esprit. Τοute subordination conduit au polythéisme<31>.
Ces hypostases distinctes sont liées de telle sorte qu' aucune ne peut être conçue sans les autres et que chacune: présιιppose les deux autres, et qu'elles constituent trois personnes parfaites, inséparablement unies: "car οù le Saint-Esprit est présent, là est aussi le Clιrist et οù est le Christ, le Père est aιιssi présent"<32>. Εn sorte que quiconque ne croit pas en l 'Esprit, ne peut certainement pas croire au Fils et qui ne croit pas au Fils ne peut certainement pas croire en Dieu le Père<33> Εn quoi consiste l'unité des hypostases? Tout d'abord, elle peut consister dans l'ousia commune. Selon Aristote, ousia peut signifier deux choses: a) ce qui est commun à tous et ne peut être objet de perception que par l'intellect et b) l'existence individuelle. Dans certaines de ses lettres, saint Basile emploie des expressions aristotéliciennes pour définir l'ousia (au premier sens) et l'hypostase (ousia au second sens)<34>. Ιl n'est pas entièrement satisfait de ces catégories, parce qιιe la logique aristotélicienne exige des divisions et des classifications qu'il rejette absolument comme inapplicables à Dieu. Parfois, il caractérise les hypostases comme étant de même ousiα, homoousios<35>. C'est conforme au dogme de Nicée, mais il s'agit d'intégrer cette notion dans les structures de la triadologie de l'école de Cappadoce, dans laquelle ousia n'est pas une chose plus élevée que les personnes, une sorte de source dont les personnes tireraient leur origine.
Le terme d'ousia, en outre, donne à première vue l'impression d'une chose matérielle et créée, bien que son usage en théologie en ait fati' un terme particulier. La manière dont saint Basile évite d'appliquer le terme homoousios au Saint-Esprit peut s'expliquer par ses hésitations en présence du mot ousia, pour les raisons mentionnées et pour cette autre raison qu'il était utilisé par les Pneumatomaques pour designer ιιηe subordination. Saint Basile ne se sert de ce terme que lorsqu'il est absolument indispensable. Ses principes théologiques ne lui permettaient pas d'insister trop sur le homoousios. ΙΙ ne veut pas donner l'impression que Dieu cοnsiste en telle et telle ousia, parce qu'il est incompréhensible et ne peut être défini. Ιl n'a pas explique le homoousios en identifiant l'essence et l'hypostase, car la personne s'y confondrait, mais en distinguant l'essence de l'hypostase, ce qui établissait la distinction des personnes. Ainsi, en tant qu'ousia la vision sans limite et incompréhensible de Dieu demeure. Pour éviter tout malentendu, saint Basile écarte délibérément le terme homoousios en ce qui concerne le Saint-Esprit, comme le fera ultérieurement le second concile oecumenique. Selon cette optique, la Trinité n'est pas composée d'une οu plusieurs ousia, mais elle est constituée par trois personnes définies. Parce que les personnes ont leur valeur et leur dignite individuelles -les mêmes pour toutes les trois- le Saint- Esprit possède le même honneur que les autres personnes de la Trinité, il est homotimos.
Saint Basile est plus à l'aise en employant les termes de physis et de theotês: "Le Père, le Fils et le Saint-Esprit ont la même nature et sont un seul Dieu"<36>. Le Saint-Esprit est une "nature divine et sainte"<37>. Nature est le mot qui convient le mieux à la personne, parce qιι'il ne décrit pas la constitution matérielle d'une chose, mais caractérise le mode d'existence.
Saint Basile n'attribue pas à l'Esprit le nom de Dieu. Αtlιanase a motivé ce refus au nom de Ια dispensation de l'oikonomia et Grégoire le Théologien l'a justifiée pour des raisons de prudence. Mais ce dernier a été parfois troublé par cette réserve et lui a demandé jusqu'à quand il cacherait la lumière sous le boisseau<38>. D'autres ont considéré Basile comme moderniste en ce qui concerne ce point, tandis que les Ariens le considéraient comme moderniste pour des raisons contraires. Les avis selon lesquels saint Basile a formulé son enseignement trinitaire soit pour des raisons d'opportunisme politique, soit par sympathie pour les Homéousiens ne semblent pas répondre à la situation de fait. Il y là d'autres raisons théologiques d'importance. Dans le système theologique de Basile, nous trouvons Dieu (= le Père), Dieu de Dieu (= le Fils) et ce qui procède de Dieu (= l'Esprit). Ιl ne doute pas que les trois soient Dieu; mais s'il nomme avec logique les trois personnes Dieu, il craint d'être accusé d'adopter trois Dieux, parce qu'il serait forcé de les placer dans un certain ordre, comme premier, second et troisième; il redoute davantage encore de détruire le caractère unique de la causalité dans la Trinité. Pour cette raison, il préfère donner aux trois personnes les noms qui les distinguent: Père, Fils et Saint-Esprit. Le nom de Saint-Esprit signifie plusieurs choses, entre autres qu'il est Dieu, ce qui suffit à le caractériser. Ιl est indiscutable qu'il considère le Saint-Esprit comme Dieu, comme il accepte qu'il soit homoousios. Ιl l'a clairement déclaré dans des conversations privées, d'après ce qu'affirme Grégoire le Théologien<39>. Εn outre, ce qu'il a dit de l'Esprit était encore trop. D'autres appelaient en fait le Saint-Esprit Dieu, sans employer la formule syn tο pneumati dans la doxologie. Car s'il est très important d'appeler Dieu le Saint-Esprit, dans certaines conditions, l'homme aussi est appelé Dieu! Ce qui est plus important, c'est de lui adresser des prières comme à Dieu.
L'unité des hypostases de la triade est heureusement exprimée par l'identitication de la puissance, de l'énergie et de la vοlonté. Un courant indivis d'énergie existe entre le Père, le Fils et l'Esprit: "Ainsi, la manière de connaître Dieu vient de l'unique Esprit, par le Fils et va au Père ιιnique; et à l'inverse, la bonté naturelle, la sanctification et l'office royal viennent du Père par le Fils unique vers l'Esprit"<40>. L'activité de la Trinité est commune, bien que certaines energies paraissent parfois séparément en raison: des hypostases. Dans la création, par exemple le Père est la cause initial de tout ce qui est créé dans le monde, le Fils la cause créatrice et l'Esprit la cause perfective, mais la source est unique. Sans doute aucune des hypostases n'a d'activité imparfaite en sorte que le secours des autres soit nécessaire. Ιl s'agit là d'une volonté unifiée; chaque hypostase a la volonté d'agir en accord avec les autres<41>. Mais surtout, l'unité des hypostases est exprimée par leur source commune, qui est le Père, comme cela a été dit plus haut.
Saint Basιle caractérise l'Esprit par une périphrase, comme image du Fils<42>, parce qu'en lui et par lui, les hommes voient le Fils. Les hypostases se font chacune la révélatrice des autres aux hommes; l'Esprit reflète en lui-même l'image du Fils, le Fils celle du Pére. Ainsi l'itinéraire de la connaissance de Dieu part de l'Esprit, par le Fils pour arriver au Père. Mais dans la .Trinité; il n'existe pas d'image de l'Esprit, de sorte qu'il demeure moins connu que les autres hypostases. Le Fils a parlé du Père et a été manifesté par l'Esprit qui a parlé dans le passé aux prophétes; comme il parle aujourd'hui à l'Eglise. Nous trouvons dans les Ecritures d'abondants témoignages sur ces deux personnes, les Père et le Fils. En outre, leur oeuvre est objective -la création du monde et l'ιnstitution des conditions de la régénérationa de l'homme- et elle tombe immédiatement sous les sens. Quant à l'Esprit, ce n'est qu'occasionnellement que l'Ecriture le mentionne. Sans doute habite-t-il dans l'Eglise et se fait-il connaître par ses énergies, mais l'expérience spirituelle que les illuminés acquièrent est souvent peu précise et ne permet pas une compréhension complète de sa personnalité. Pour cette raison, les Pères ont évité de préciser ses origines. Même le terme de "procession", comme οn l'a dit ailleurs, ne dissipe pas notre ignorance du mode de son existence, ignorance que saint Basile considère d'ailleurs comme sans importance<43>. C'est la raison pour laquelle, en interprétant l'origine du Saint-Esprit en termes non bibliques, nous avons procédé avec prudence: "Car il est typique de l'homme pieux de ne rien dire, du Saint-Esprit que les Ectitures passent sous silence; et cela, parce qιιe c'est notre convιction que l'experience et la compréhension à son sujet résident pour nous dans le monde à venir"<44>. Ιl était aussi prudent lorsqu'il caractérisait l'Esprit comme homoousios et comme Dieu, ainsi que nous l'avons dit. L'Eglise a toujours eu et a toujours concervé cette attitude de prudence; bien qu'elle ait composé des hymnes à. l'Esprit, elle n'a pas composé de prières qui lui fussent adressées, à l'exception d'une seule. Dans ses prières à Dieu, elle appelle cependant en général l'Esprit Saint, co-éternel, de valeur identique,de même gloire et homoousios. L'hymnologie de l'Eglise reflète l'enseignement de Grégoire le Théologien qui etait plus hardi dans sa manière de présenter la divinité de l'Esprit, tandis que les prιères de la Pentecôte reflètent l'enseιgnement de Basile le Grand.
NOTES
* Ρubliée dans Etudes Patristiques: Le traité sur le Saint Ésprit de Saint Basile, Verbum Caro vοl. ΧΧΙ1 (Νo 88), pp. 158-171.
26. Catéch. 16, 4; ΡG 33, 921-924.
27. Oratio 41, 5; ΡG 36, 436.
28. Epist. 125, 3; PCi 32, 549.
29. Epist. 236, 6; PG 32, 884. Loeb, 3, p. 402. De Fide 4; PG 31, 685 ss.
30. Contra Sab. et Ar. et Anom. 7; ΡG 31, 616.
31. De Spir. Sancto, chap. 18, 44-47; ΡG 32, 148-153.
32. Contra Sαb. et Ar. et Anom. 5, ΡG 31, 609.
33. De Spir. Sancto, chap. 11, 27; PG 32, 116.
34. Epist. 214, 4; PG 32, 789; Epist. 236, 6; ΡG 32, 884, Loeb, 3.
35. Ibid. 214, 4; PG 32, 789.
36. Epist. 210, 4; ΡG 32, 773.
37. Epist. 125, 3; PG 32, 549.
38. Epist. 58; PG 37, 116.
39. Oratio 43, 69; ΡG 36, 589.
40. De Spir. Sancto, chap. 18, 47; PG 32, 153.
41. Chap. 16, 38; Ρ 32, 136. Cf. aussi 8, 2Ι; ΡG 32, 105. Epist. p. 402.
42. De Spir Sancto, chap. 9, 23; ΡG 32, 109, 26, 64; ΡG 32, 185. 18, 47; ΡG 32, l53.
43. Contrα Sab. et Ar. et Anam. 6; PG 31, 613.
44. Contra Εun. 3, 7; ΡG 29, 669.
5. L' économie de
l'Esprit
Les activités de l' Esprit, ineffables dans leur ampleur et innombrables<45>, se rapportent à l'enseignement, à l'adaptation filiale et en particuliers à la répartition des charismes; aucun charisme n' est accordé à la créature sans l'action de l'Esprit<46>. Saint Basile résume leurs fruits dans les termes de confirmation, sanctification et perfection. Il définit ainsi l'activité des hypostases dans la creation des puissances angéliques: "Par conséquent, le chiffre trois vient à l'esprit: le Seigneur ordonne, le Logos qui crée et l'Esprit qui affermit. Or, qu'est-ce que c'est qu'affermir, sinon parfaite en sainteté, ce mot désignant sûrement le fait d'être ferme, immuable et solidement fixé dans le bien. Il n'y a pas de sanctification sans l'Esprit"<47>.
Ces énergies se sont manifestées de toute éternité: avant le monde invisible et en-deça du temps. Elles recouvrent toutes les époques de l'histoire de l'être capable de raison. Βasile semble exclure de l'activité de l'Esprit la créature dépourvue de raison et c'est juste parce que seuls les êtres doués de raison et de personnalité οn le besoin et la capacité de perfection par leur élévation au rang de peraonnalités. Ιl et significatif que saint Basile, dans le passage de sa seconde homelie sur l'hexaéméron οú il est obligé d'interpréter le texte: "Et Ι'Esprit de Dieu se mouvait sur les eaux"; ne présente pas une interprétation de son crû mais en appelle à l'autorité unanime pour montrer que cette phrase biblique signifie la vivification de la natιιre de l'eau par l'Esprit. Ιl a rendu parfaites les puissances angéliques par la sanctification, lors de la création du monde; au cours de la progressive restauration de l'humanité, il a fait don d'un de ses charismes les plus importants, la prophétie<48>l; au moment de la véritable restauration; il etait présent et actif avec le Christ<49> 8; dans la vie de l'Eglise, il crée son ornementation<50> et lors du jugement dernier, il sera avec le Jιιge<51>. D'un certain point de vue, l'activité par excellence de l'Esprit est la conservation continuellement active de la revelation et sa répartition individuelle aux êtres particuliers.
L'Esprit habite dans l'Eglise et est possédé simultanement par l'ensemble de ses membres comme par chacun en particulier. C'est le lien qui rattache ses membres dans le temps et dans l'espace<52>. Les ministres de l'Eglise sont éclaires pour devenir de bons bergers et les fidèles sont fortifiés pοιιr devenir un bon troupeau. Dans les deux cas, l'activité de l'Esprit se rapporte à la personnalité de celui qui en est le porteur.
L'activité de l'Esprit est bien plus personnelle dans la vie privée du croyant. Descendu sur tous les croyants, il touche seulement celui qui est pur de coeur, comme le soleil ne touche que l'oeil en bonne santé<53>. Sur ce point, οn prend conscience des tendances ascétiques de Basile.
L'illumination de l'Esprit touche davantage l'âme et le coeur que l'intellect. Sa grâce, ineffablement unie à la personnalité et à l'existence humaine, est une puissance de régénération permanente en elles qui les rend spirituelles et porteuses de l'Esprit<54>. Aussi l'Esprit peut-il être designe comme l'eidos<55>, qui donne une forme à l'homme naturel, le libère de l'esclavage aux puissances et aux nécessités naturelles, et en fait une personnalité libre par une métamorphose pleine de force<56>. L'homme spirituel est rendu conforme à l'image de Dieu, il est en quelque sorte l'image de l'Εsprit<57>, qui, alors (qu'on ne le trouve pas dans la Trinité, apparait dans l'humanité.
Demeurant dans les saints, l'Esprit est vu par eux mystiquement; l'ignorance originelle est ainsi surmontée existentiellement. Ιl ne se manifeste pas seulenιent lui-même à eux, il manifeste aussi la gloire du Fils et la vision archétypique. "Puisque nous voyons la beauté de l'image invisible de Dieu dons au spectacle surnaturel des archetypes, nous y trouvonis aussi, inséparablement uni à Dieu, l'Esprit de connaissance qui offre en lui-même aux amateιιrs de la vérité le pouvoir de voir l'image. . . Ιl manifeste ainsi en lui-même la glnire du Fils et il offre en lui-même la gloire du Fils et il offre en lui même lα connaissance de Dieu aux vrais adorateurs<58>. Le but du pélerinage de l'homme spirituel est la vision du Dieu triadiqιιe.Cela veut dire qu'il a déjà atteint un tel degré de perfection qu'il peut habiter avec Dieu, lui être semblable et devenir Dieu <59>. Par l'activité du Saint-Esprit, l'humanité est reliée à la Trinité.
Les activités de l' Esprit, ineffables dans leur ampleur et innombrables<45>, se rapportent à l'enseignement, à l'adaptation filiale et en particuliers à la répartition des charismes; aucun charisme n' est accordé à la créature sans l'action de l'Esprit<46>. Saint Basile résume leurs fruits dans les termes de confirmation, sanctification et perfection. Il définit ainsi l'activité des hypostases dans la creation des puissances angéliques: "Par conséquent, le chiffre trois vient à l'esprit: le Seigneur ordonne, le Logos qui crée et l'Esprit qui affermit. Or, qu'est-ce que c'est qu'affermir, sinon parfaite en sainteté, ce mot désignant sûrement le fait d'être ferme, immuable et solidement fixé dans le bien. Il n'y a pas de sanctification sans l'Esprit"<47>.
Ces énergies se sont manifestées de toute éternité: avant le monde invisible et en-deça du temps. Elles recouvrent toutes les époques de l'histoire de l'être capable de raison. Βasile semble exclure de l'activité de l'Esprit la créature dépourvue de raison et c'est juste parce que seuls les êtres doués de raison et de personnalité οn le besoin et la capacité de perfection par leur élévation au rang de peraonnalités. Ιl et significatif que saint Basile, dans le passage de sa seconde homelie sur l'hexaéméron οú il est obligé d'interpréter le texte: "Et Ι'Esprit de Dieu se mouvait sur les eaux"; ne présente pas une interprétation de son crû mais en appelle à l'autorité unanime pour montrer que cette phrase biblique signifie la vivification de la natιιre de l'eau par l'Esprit. Ιl a rendu parfaites les puissances angéliques par la sanctification, lors de la création du monde; au cours de la progressive restauration de l'humanité, il a fait don d'un de ses charismes les plus importants, la prophétie<48>l; au moment de la véritable restauration; il etait présent et actif avec le Christ<49> 8; dans la vie de l'Eglise, il crée son ornementation<50> et lors du jugement dernier, il sera avec le Jιιge<51>. D'un certain point de vue, l'activité par excellence de l'Esprit est la conservation continuellement active de la revelation et sa répartition individuelle aux êtres particuliers.
L'Esprit habite dans l'Eglise et est possédé simultanement par l'ensemble de ses membres comme par chacun en particulier. C'est le lien qui rattache ses membres dans le temps et dans l'espace<52>. Les ministres de l'Eglise sont éclaires pour devenir de bons bergers et les fidèles sont fortifiés pοιιr devenir un bon troupeau. Dans les deux cas, l'activité de l'Esprit se rapporte à la personnalité de celui qui en est le porteur.
L'activité de l'Esprit est bien plus personnelle dans la vie privée du croyant. Descendu sur tous les croyants, il touche seulement celui qui est pur de coeur, comme le soleil ne touche que l'oeil en bonne santé<53>. Sur ce point, οn prend conscience des tendances ascétiques de Basile.
L'illumination de l'Esprit touche davantage l'âme et le coeur que l'intellect. Sa grâce, ineffablement unie à la personnalité et à l'existence humaine, est une puissance de régénération permanente en elles qui les rend spirituelles et porteuses de l'Esprit<54>. Aussi l'Esprit peut-il être designe comme l'eidos<55>, qui donne une forme à l'homme naturel, le libère de l'esclavage aux puissances et aux nécessités naturelles, et en fait une personnalité libre par une métamorphose pleine de force<56>. L'homme spirituel est rendu conforme à l'image de Dieu, il est en quelque sorte l'image de l'Εsprit<57>, qui, alors (qu'on ne le trouve pas dans la Trinité, apparait dans l'humanité.
Demeurant dans les saints, l'Esprit est vu par eux mystiquement; l'ignorance originelle est ainsi surmontée existentiellement. Ιl ne se manifeste pas seulenιent lui-même à eux, il manifeste aussi la gloire du Fils et la vision archétypique. "Puisque nous voyons la beauté de l'image invisible de Dieu dons au spectacle surnaturel des archetypes, nous y trouvonis aussi, inséparablement uni à Dieu, l'Esprit de connaissance qui offre en lui-même aux amateιιrs de la vérité le pouvoir de voir l'image. . . Ιl manifeste ainsi en lui-même la glnire du Fils et il offre en lui-même la gloire du Fils et il offre en lui même lα connaissance de Dieu aux vrais adorateurs<58>. Le but du pélerinage de l'homme spirituel est la vision du Dieu triadiqιιe.Cela veut dire qu'il a déjà atteint un tel degré de perfection qu'il peut habiter avec Dieu, lui être semblable et devenir Dieu <59>. Par l'activité du Saint-Esprit, l'humanité est reliée à la Trinité.
NOTES
* Ρubliée dans Etudes Patristiques: Le traité sur le Saint Ésprit de Saint Basile, Verbum Caro vοl. ΧΧΙ1 (Νo 88), pp. 158-171.
45. De Spir. Sαncto, chap. 18, 48; PG 32, 156.
46. Chap. 24, 55; Ρ 32, 172.
47. Chap. 16, 38; ΡG 32, 136.
48. Chap. 16, 38; PG 32, 137.
49. Chap. 18, 42; PG 32, 157.
50. Chap. 16, 39; PG 32, 140.
51. Chap. 16, 40; PG 32, 141.
52. Chap. 26, 61; PG 32, 181.
53. Chap. 9, 23; PG 32, 109.
54. Ibid.
55. Chap. 21, 52; PG 32,165.
56. Chap. 26, 61; PG 32, Ι80.
57. Chap. 26, 61; PG 32, 180.
58. Chap. 18, 47; PG 32, 153.
59. Chap. 9, 23; PG 32, 109.