juillet 28, 2010

Analyse coranique de la lettre des 138 musulmans

Lettre ouverte et appel des guides religieuses [sic] musulmaines [sic]

Adressée par 138 savants musulmans aux autorités spirituelles de la Chrétienté, le 13 octobre 2007, et dont c’est le premier anniversaire d’envoi au pape Benoît XVI.

On lira ci-après le travail effectué sur la « partie musulmane » de cette lettre.

Ce travail a consisté à vérifier l’intégrité des versets coraniques cités dans ladite lettre, insérés dans le corps du texte ou mis en exergue dans des paragraphes distincts.

Cette vérification a été effectuée en utilisant le texte coranique dans sa langue originelle ainsi que sa traduction française, quasi officielle, réalisée par les soins du Ministère saoudien des affaires religieuse et portant son imprimatur.

La vérification à laquelle il a été procédé a rendu nécessaire des annotations et, parfois, des commentaires, qu’on a apportés afin d’éclaircir certains points aux yeux du lecteur non arabophone ou non arabisant et peu au fait des choses de l’islam.

A. Observations préliminaires

a) Traduction du Coran

Les signataires n’indiquent pas quelle traduction française du Coran ils ont utilisé dans leur lettre.

Il convient d’observer d’ores et déjà que cette traduction est très différente des traductions « standard », courantes en France : celle portant l’imprimatur du Ministère saoudien des affaires religieuses précitée ainsi que celle, très peu différente en vérité, qui est homologuée par l’UOIF (Union des organisations islamiques de France) et la Mosquée de Paris.

Pour être dans un français élégant et plus actuel, la traduction utilisée par les signataires n’en est pas moins fautive à maints endroits. Fautive en ce sens qu’elle prend des libertés avec le texte coranique arabe comme avec sa traduction « standard » ; celle-ci étant à tous points de vue plus fidèle à la langue originelle du texte coranique.

Ecarts et non-conformités sont signalés dans des notes.

b) Hadiths

Pour les besoins de leur argumentaire, les signataires ont également utilisé des hadiths (faits, gestes et dicts du prophète Mahomet) dont ils ont signalé la source dans des notes rejetées à la fin de leur lettre. Cependant, ils n’en signalent pas l’édition, ni la traduction utilisée, si celle-ci existe.

Ainsi, le travail de vérification et de contrôle n’a pu être effectué sur les hadiths cités.

Il convient d’observer enfin que le premier hadith, cité dans l’introduction de la lettre, p.1, § 3, est donné sans mention de source.

B. Méthodologie

On désignera par Signataires les 138 personnalités musulmanes qui ont adressé la lettre aux autorités spirituelles de la Chrétienté.

On désignera ci-après la traduction due au Ministère saoudien des affaires religieuses et portant son imprimatur par traduction standard.

1. Encadrés

Les versets coraniques cités par les Signataires ou auxquels ils se réfèrent sont encadrés.

Ces versets, avec les notes qui parfois les accompagnent, sont intégralement reproduits en :

- noir, selon la traduction standard ;

- rouge, selon la traduction des Signataires et tels que cités ;

- bleu lorsqu’on a cru utile d’ajouter des versets précédant ou suivant ceux qui sont cités, afin d’en mieux comprendre le sens.

Les couleurs noire et rouge permettront au lecteur de comparer ces traductions entre elles.

2. Restitutions

Les restitutions sont en vert. Elles concernent le titre des sourates et le lieu de leur révélation.

L’explication de certains termes arabes ou de certaines notions, dans les versets comme dans les notes qui les accompagnent, est également en vert, précédée de la mention i.e., entre crochets carrés.

3. Notes

Les notes ajoutées dans le cadre de ce travail sont en gras noir et non numérotées. Elles sont placées au-dessous des encadrés.

4. Commentaires

Les commentaires faits dans le cadre de ce travail sont placés au-dessous des encadrés, immédiatement après les notes quand celles-ci existent.

Le tafsir (explication grammaticale et contextuelle du Coran, assortie de commentaires) de Tabari, mis en ligne par les soins du Ministère saoudien des affaires religieuses a parfois été utilisé dans les commentaires apportés.

5. Analyse

L’analyse de la lettre des 138 personnalités musulmanes est placée à la fin du présent document

Introduction

p.2 :

112, al-Ikhlas [le monothéisme pur, mecquoise]

112:1. Dis : « Il est Alllah, Unique.

112:2. Allah, le Seul à être imploré pour ce que nous désirons.

112:3. Il n’a jamais engendré, n’a pas été engendré non plus.

112:1. Dis C’est Lui Dieu l’Un !

112:2. Dieu se suffit à Lui-même !

La traduction des Signataires est fautive pour 112:2. L’écart est important en ce sens qu’il donne à ce verset une signification qu’il n’a pas.

73, L’enveloppé [mecquoise]

773:8. Et rappelle-toi le nom de ton Seigneur et consacre-toi entièrement à Lui

73:8. Invoque sans cesse le nom de ton Seigneur et communie intensément avec Lui.

La notion de communion est une notion chrétienne, étrangère à l’islam. Les signataires font apparemment du zèle dans leur traduction. Serait-ce pour trouver des points de convergence avec le christianisme ?

3, La famille de Imran [médinoise]

3:64. Dis : « Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah. » Puis, s’ils tournent le dos, dites : « Soyez témoins que nous, nous sommes soumis. »

3:64. « Ô gens des Ecritures ! Elevez-vous à une parole commune entre vous et nous, à savoir de n’adorer que Dieu Seul, de ne rien Lui associer et de pas prendre les uns les autres pour des maîtres en dehors de Dieu. », S’ils s’y refusent, dites leurs que, en ce qui nous concerne, notre soumission à Dieu est totale et entière.

Plus fidèle, la traduction standard est celle qui traduit le mieux, dans la forme et dans l’esprit, le texte coranique.

Dans la traduction produite par les Signataires, l’expression « Elevez-vous », juste après l’apostrophe aux « gens des Ecritures » (juifs et chrétiens), signifierait-elle qu’on considère ces derniers comme dans une position subalterne et qu’on leur enjoint, par conséquent, de s’élever ?

Le deuxième paragraphe de la page 3 semble le confirmer, puisque les Signataires y déclarent : « Conformément au Coran nous, en tant que musulmans, invitons les chrétiens à s’accorder avec nous sur ce qui nous est commun… », etc. On observe qu’il ne s’agit pas de s’accorder les uns avec les autres, mutuellement et réciproquement, mais de chrétiens qui doivent s’accorder avec des musulmans.

Enfin et comme l’indique son titre, la Famille de Imran, cette sourate se rapporte principalement à la Vierge Marie, « Meryem fille de Imran » dans le Coran, à Jésus-Christ, ainsi qu’à la perception mahométane du christianisme et du judaïsme.

Chapitre 1 : L’amour de Dieu dans l’islam. p. 4-8

p.4

16, an-Nahl [Les Abeilles, mecquoise]

16:125. Par la sagesse et la bonne exhortation appelle (les gens) au sentier de ton Seigneur. Et discute avec eux de la meilleure façon. Car c’est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s’égare de Son sentier et c’est Lui qui connaît le mieux celuiqui est bien guidé.

16:125. Appelle à suivre la Voie de ton par la sagesse et la bonne exhortation, et ne discute avec eux que de la meilleure manière. C’est ton Seigneur qui connaît le mieux celui qui s’écarte de sa Voie comme il connaît le mieux ceux qui sont bien guidés.

33, al-Ahzab, [les coalisés, médinoises]

33:4. Allah n’a pas placé à l’homme deux cœurs dans sa poitrine. Il n’a pas assimilé à vos mères vos épouses [à qui vous dite en les répudiant] : « Tu es [aussi illicite] pour moi que le dos de ma mère (1). » Il n’a point fait de vos enfants adoptifs vos propres enfants. Ce sont des propos [qui sortent de votre bouche]. Mais Allah dit la vérité et c’est Lui qui met [l’homme] dans la bonne direction.

(1) Le dos de ma mère : l’une des formules du divorce chez les bédouins.

33:4. Dieu n’a pas doté l’homme de deux cœurs.

Cette sourate est assez cocasse et mériterait un long développement. Elle se rapporte essentiellement aux ennuis domestiques de Mahomet à Médine, établit une sorte de règlement intérieur à l’usage de son gynécée et évoque les querelles de ses femmes jalouses, dont deux, non des moindres, s’étaient liguées contre lui. Elle justifie également que Mahomet ait fait répudier la femme de son fils adoptif, Zaïd ibn Haritha, afin de lui permettre de la prendre pour femme. Ce verset 33.34 (et celui qui le précède) rendent illicite l’adoption. On voit bien pourquoi.

C’est assez curieux que les Signataires citent un bout de ce verset dans leur argumentaire, alors qu’il est ponctuel, contextuel, et n’a, par conséquent, pas de portée universelle.

p.4-5

2, La vache [médinoise]

2:165. Parmi les hommes, il en est qui prennent, en dehors d’Allah, des égaux à Lui, en les aimant comme on aime Allah. Or les croyants sont les plus ardents dans l’amour d’Allah. Quand les injustes verront le châtiment, ils sauront que la force tout entière est à Allah et qu’Allah est dur en châtiment !...

2:165. Il est des hommes qui prennent en dehors de Dieu des associés qu’ils se mettent à aimer à l’égal de Dieu Lui-même ! Mais ce sont les croyants qui vouent à Dieu le plus grand amour.

Le châtiment. Dans le texte coranique arabe, on lit : la torture.

Les Signataires tronquent ici le verset coranique qui, de ce fait, perd la moitié de sa signification.

p.5

39, al-Zumar (Les groupes, [mecquoise]

39:23. Allah a fait descendre le plus beau des récits, un Livre dont [certains versets] se ressemblent et se répètent. Les peaux de ceux qui redoutent leur seigneur frissonnent (à l’entendre) ; puis leurs peaux et leurs cœurs s’apaisent au rappel d’Allah. Voilà le [livre] guide d’Allah par lequel Il guide qui Il veut. Mais quiconque Allah égare n’a pas de guide.

39:24. Est-ce que celui qui, au Jour de la résurrection, se sera protégé le visage contre le pire châtiment … Et l’on dira aux injustes : « Goûtez à ce que vous avez acquis. »

39:23. leurs peaux et leurs cœurs s’adoucissent à l’évocation de Dieu…

Passons ici sur la faute de français et de grammaire. Dans les deux cas, les traducteurs auraient dû employer le singulier pour « peaux » et « cœurs ». Les êtres n’ont qu’une peau et un cœur ; ils ont en revanche des yeux, des mains, des cheveux, etc.

Même observation que ci-dessus : tronqué par les Signataires, le verset 39:23 par la moitié de sa signification.

67, al-Mulk [La royauté, mecquoise]

67:1. Bénit soit celui dans la main de qui est la royauté, et il est Omnipotent.

67:1. Bénit soit Celui qui détient le royaume et qui est Tout Puissant.

29, L’araignée [mecquoise]

29:61. Si tu leur demandes [aux mécréants] : « Qui a crée les cieux et la terre, et assujetti le soleil et la lune ? », ils diront très certainement « Allah. » Comment se fait-il qu’ensuite ils se détournent (du droit chemin ?)

29:62. Allah dispense largement ou restreint Ses dons à qui il veut parmi Ses serviteurs. Certes, Allah est Omniscient.

29:63. Si tu leur demandes : « Qui a fait descendre du ciel une eau avec laquelle Il fit revivre la terre après sa mort ? », ils diront très certainement : « Allah. » Dis : « Louange à Allah ! » mais la plupart d’entre eux ne raisonnent pas.

29:64. Cette vie d’ici-bas n’est qu’amusement et jeu. La demeure de l’au-delà est assurément la vraie vie.

29:61-63. Si tu leur demandes : « Qui a crée les cieux et la terre, et assujetti le soleil et la lune ? », ils répondront sûrement « C’est Dieu. » Pourquoi alors se détournent-ils de Lui ? N’est-ce pas Dieu qui prodigue ses richesses ou les mesure à qui Il veut parmi ses créatures, et dont la science englobe toute chose ? Et si tu leur demandes : « Qui a fait descendre du ciel une eau pour revivifier la terre après sa mort ? », ils répondront sûrement « C’est Dieu ! » Dis : « Louange à Dieu ! » mais la plupart d’entre eux ne raisonnent pas.

14, Abraham [mecquoise]

14:32. Allah, c’est lui qui a crée les cieux et la terre et qui, du ciel, a fait descendre l’eau ; grâce à laquelle Il a produit des fruits pour vous nourrir. Il a soumis à votre service les vaisseaux qui par Son ordre, voguent sur la mer. Et il a soumis à votre service les rivières.

14:33. Et pour vous il a assujetti le soleil et la lune à une perpétuelle révolution. Et Il vous a assujetti la nuit et le jour.

14:34. Il vous a accordé tout ce que vous Lui avez demandé. Et si vous comptiez les bienfaits d’Allah, vous ne sauriez les dénombrer. L’homme est vraiment très injuste, très ingrat.

14:32-34. C’est Dieu qui a crée les Cieux et la Terre. C’est Lui qui, fait descendre du ciel une eau par laquelle Il fait produire des fruits pour vous nourrir. C’est Lui qui a mis à votre service les vaisseaux qui, par Son ordre, voguent sur la mer, comme Il a mis à votre service les rivières. Et c’est pour vous aussi qu’il a assujetti le Soleil et la Lune à une gravitation perpétuelle, de même qu’Il a mis à votre service la nuit et le jour. Il a accédé à presque toutes vos demandes, au point que si vous essayiez de compter les bienfaits du Seigneur, vous ne sauriez les énumérer. Mais l’homme est pétri d’injustice et d’ingratitude.

Gravitation. Il y a ici un souci manifeste de concordance, étranger à la lettre du verset.

La traduction standard est plus fidèle à la lettre du coran.

1, al-Fatiha [prologue ou ouverture, mecquoise]

1:1. Au nom d’Allah, le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux.

1:2. Louange à Allah, Seigneur de l’univers.

1:3. Le Tout Miséricordieux, le Très Miséricordieux,

1:4. Maître du Jour de la rétribution.

1:5. C’est Toi [Seul] que nous adorons, et c’est Toi [Seul) dont nous implorons le secours.

1:6. Guide-nous dans le droit chemin.

1:7. Le chemin de ceux que Tu as comblés de faveurs, non pas de ceux qui ont encouru Ta colère, ni des égarés.

1:1. Au nom de Dieu, le Clément, le Miséricordieux.

1:2. Louange à Dieu, Seigneur des Mondes.

1:3. Le Clément, le Miséricordieux,

1:4. Maître du Jour de la rétribution.

1:5. C’est Toi que nous adorons ! C’est Toi dont nous implorons le secours !

1:6. Guide-nous dans la voie droite.

1:7. La Voix de ceux que Tu as comblés de bienfaits, non la voix de ceux qui ont mérité Ta colère, ni celle des égarés.

L’univers (dans la traduction standard) et des Mondes (dans la traduction produite par les Signataires) ne correspondent pas à ce que dit le texte coranique arabe, où on lit : « Seigneur des deux Mondes » [i.e. ici-bas et l’au-delà].

Encouru (dans la traduction standard) et mérité (dans la traduction produite par les Signataires) ne correspondent pas à ce que dit le texte coranique arabe, où on lit : « objets de Ta colère ».

La Fatiha est la sourate que les musulmans apprennent par cœur dès l’enfance et qui est récitée pendant chaque prière. Cinq fois par jour au moins, pour les prières obligatoires, et dix-sept fois, selon les Signataires.

Or si on consulte Tabari (839-923), savant commentateur du coran, dont les travaux font référence et auxquels les signataires se réfèrent par ailleurs, p. 14, § 3, on lira à l’endroit du verset 1:7 que ceux qui ont « encouru » ou « mérité » ou « objet de » la colère d’Allah, selon ma propre traduction, sont les juifs, tandis que les « égarés » désigne les chrétiens.

La plupart des commentateurs du coran, auteurs de tafsir [i.e. recueil d’explication contextuelle, grammaticale et de commentaires sur le coran] ne dit pas autrement. On se doit de préciser enfin que les tafsirs indiquent aux musulmans comment ils doivent lire et comprendre le coran.

Il en résulte que, de cinq à dix-sept fois par jour, un musulman qui récite la Fatiha en accomplissant ses prières se montre pour le moins discourtois envers les gens du Livre.

Les Signataires, qui sont des savants, des universitaires ou des autorités spirituelles de l’islam, ne peuvent l’ignorer. Par conséquent, on peut se demander quelle est l’opportunité de citer ce verset dans un document par lequel on invite les chrétiens à vivre en paix avec les musulmans et de poursuivre avec eux le dialogue islamo-chrétien ?

p. 6

19, Marie [mecquoise]

19:88. Et ils ont dit : « Le Tout Miséricordieux S’est attribué un enfant ! »

19:89. Vous avancez certes là une chose abominable !

19:90. Peut s’en faut que les cieux ne s’entrouvrent à ces mots, que la terre ne se fende et que les montagnes ne s’écroulent,

19:91. du fait qu’ils ont attribué un enfant au Tout Miséricordieux,

19:92. alors qu’il ne convient nullement au Tout Miséricordieux d’avoir un enfant !

19:93. Tous ceux qui sont dans les cieux et sur la terre se rendront auprès du Tout Miséricordieux, [sans exception], en serviteurs.

19:94. Il les a certes dénombrés et bien comtés.

19:95. Et au Jour de la résurrection, chacun d’eux se rendra seul auprès de Lui.

19:96. A ceux qui croient et font de bonnes œuvres, le Tout Miséricordieux accordera Son amour. (1)

(1) Accordera Son amour : et ils s’aimeront réciproquement.

19:96. Ceux qui ont cru et accompli les bonnes œuvres, le Miséricordieux sera pour eux plein d’amour

Amour. Dans le texte coranique arabe, on lit : « de l’affection »

Aucune des deux traductions de ce verset 19:96 n’est satisfaisante. Dans le texte arabe du verset, on lit : « […] le Miséricordieux leur procurera de l’affection. »

Cela explique la note à ce verset dans la traduction standard : plus scrupuleux, les traducteurs ont voulu rendre compte de l’affection mutuelle dont le Miséricordieux fait jouir ceux qui accomplissent de bonnes œuvres. Dans son tafsir, Tabari ajoute : « ici-bas ».

La traduction reproduite par les Signataires est donc rien moins que fidèle. Cela ferait-il partie de leur zèle à trouver des points de convergence avec le christianisme ? On aurait aimé, en revanche, qu’ils expliquassent le rapport entre le verset qu’ils citent et ceux qui le précèdent.

2, La vache [médinoise]

2:194. Le Mois sacré pour le Mois sacré ! – Le talion s’applique à toute chose sacrée −. Donc, quiconque transgresse contre vous, transgressez contre lui, à transgression égale. Et craignez Allah. Et sachez qu’Allah est avec les pieux.

2:195. Et dépensez dans le sentiez d’Allah. Et ne vous jetez pas par vos propres mains dans la destruction. Et faites le bien. Car Allah aime les bienfaisants.

2:196. Et accomplissez pour Allah le pèlerinage et la Umra [i.e. pèlerinage à la Mecque en dehors de la période rituelle]. Si vous en êtes empêchés, alors faites un sacrifice qui vous soit facile. Et ne rasez pas vos têtes avant que l’offrande [l’animal à sacrifier] n’ait atteint son lieu d’immolation. Si l’un d’entre vous est malade ou souffre d’une affection de la tête (et doit se raser), qu’il se rachète alors par un Siyam [i.e. jeûne] ou par une aumône ou par un sacrifice. Quand vous retrouverez ensuite la paix, quiconque a joui d’une vie normale après avoir fait la Umra en attendant le pèlerinage, doit faire un sacrifice qui lui soit facile. S’il n’a pas les moyens, qu’il jeûne trois jours pendant le pèlerinage et sept jours une fois rentré chez lui, soit en tout dix jours. Cela est prescrit pour celui dont la famille n’habite pas auprès de la Mosquée sacrée. Et craignez Allah et sachez qu’Allah est dur en punition.

2:194-195. … Craignez Dieu et sachez qu’Il est avec ceux qui le craignent. / Faites des largesses pour soutenir la Cause de Dieu ! Ne vous exposez pas, de votre initiative à la perdition ; mais agissez de la manière la plus bienfaisante, Dieu aime les vertueux.

2:196. … Craignez donc Dieu et sachez que Dieu est implacable quand il sévit.

Tronqués, les versets reproduits par les Signataires en perdent parfois leur sens.

Il est cependant intéressant de remarquer que la crainte qu’Allah exigée des fidèles est assortie de menaces de châtiments « implacables ». Crainte et obéissance sont le pendant qu’Allah réserve aux humains. Il n’est pas demandé à ces derniers d’aimer Allah, mais de le craindre, de lui obéir et d’accomplir de bonnes œuvres.

Les versets cités ci-dessous le disent clairement.

9, Le désaveu, ou le repentir [médinoise]

9:36. Le nombre de mois, auprès d’Allah, est de douze [mois], dans la prescription d’Allah, le jour où il créa les cieux et la terre. Quatre d’entre eux sont sacrés : telle est la religion droite. [Durant ces mois], ne faites pas de tort à vous-mêmes. Combattez les associateurs sans exception, comme ils vous combattent sans exception. Et sachez qu’Allah est avec les pieux.

9:38. Ô vous qui croyez ! Qu’avez-vous ? Lorsqu’on vous a dit : « Lancez-vous dans le sentier d’Allah » ; vous vous êtes appesantis sur la terre. La vie présente vous agrée-t-elle plus que l’au-delà ? – Or, la jouissance de la vie présente ne sera que peut de chose, comparée à l’au-delà !

9:39. Si vous ne vous lancez pas au combat, Il vous châtiera d’un châtiment douloureux et vous remplacera par un autre peuple. Vous ne lui nuirez en rien. Et Allah est Omnipotent.

9:36. … Et sachez que Dieu est avec ceux qui Le craignent.

9:38-39. Ô vous qui croyez ! Qu’avez-vous à rester cloués au sol, lorsqu’on vous a dit : « Allez combattre pour la cause de Dieu ? » ; vous vous êtes appesantis sur la terre. La vie présente vous agrée-t-elle plus que l’au-delà ? Préférez-vous la vie présente à la vie future ? Mais les plaisir de cette vie ne sont-ils pas bien peu de chose / Si vous refusez d’aller au combat, Dieu sévira durement contre vous et choisira un autre peuple que vous pour Le servir, sans que vous puissiez lui nuire en quoique ce soit, car Sa puissance n’a pas de limite.

La prescripton. Dans le texte arabe, on lit : « le Livre. »

Ces versets et plus généralement l’ensemble de la sourate font référence à l’attitude des compagnons de Mahomet pendant les attaques dirigées contre les « ennemis d’Allah ». Ici, il s’agit en l’occurrence de la bataille de Tabük, au nord de l’Arabie, en territoire byzantin, l’an 9 de l’hégire (631).

On peut se demander à nouveau quelle est l’opportunité de citer ces versets ou ces fragments de versets, au contexte connu et dont l’universalité est improbable, dans un document par lequel on invite les chrétiens à vivre en paix avec les musulmans et de poursuivre avec eux le dialogue islamo-chrétien ? L’on pourrait même se demander si ces citations ne sont pas commandées par une arrière-pensée.

p. 7

64, at-Taghabun [La grande perte médinoise]

64:1. Ce qui est dans les cieux et ce qui est sur la terre glorifient Allah. A Lui la royauté et à Lui les louanges. Et Il est omnipotent.

64:1. Tous ce qui est dans les Cieux et dans la Terre glorifie Dieu. A lui appartient le Royaume et la Louange, et Il est puissant sur toutes choses.

64, at-Taghabun [La grande perte médinoise]

64:4. Il sait ce qu’il y a dans les cieux et la terre, et il sait ce que vous cachez ainsi que ce que vous ne divulguez pas. Et Allah connaît bien le contenu des poitrines.

64:4. Il sait ce qu’il y a dans les Cieux et Il sait ce qu’il y a dans la Terre, et Il connaït ce que vous cachez et ce que vous divulguez. Et Dieu est parfaitement au courant de ce que renferment les poitrines des hommes.

p. 7

64, at-Taghabun [La grande perte médinoise]

64:16. Craignez Allah donc autant que vous pouvez, écoutez, obéissez et faites largesses. Ce sera un bien pour vous. Et quiconque a été protégé contre sa propre avidité… ceux-là sont ceux qui réussissent.

64:16. Craignez donc Dieu autant que vous le pouvez ! écoutez, obéissez et dépensez, dans l’intérêt de vos âmes, car se sont ceux qui se prémunissent contre leur propre avarice qui seront les bienheureux.

6, al-An’am [Les bestiaux, mecquoise]

6:162. Dis : « En vérité, ma Salat [i.e. prièr islamique], mes actes de dévotion, ma vie et ma mort appartiennent à Allah, Seigneur de l’Univers.

6:163. A Lui nul Associé ! Et voilà ce qu’il m’a été ordonné, et je suis le premier à me soumettre. »

6:164. Dis : « Chercherais-je un autre Seigneur qu’Allah, alors qu’Il est le Seigneur de toute chose ? Chacun n’acquiert [le mal] qu’à son détriment : personne ne portera le fardeau [responsabilité] d’autrui. Puis vers votre Seigneur sera votre retour et Il vous informera de ce que en quoi vous diverger.

6:162-164. Dis : Ma prière, mes actes de dévotion, ma vie et ma mort sont entièrement voués à Dieu, Seigneur des Mondes, / qui n’a point d’associés. Tel est l’ordre que j’ai reçu et auquel je suis le premier à me soumettre. / Dis : Devrais-je chercher un autre maître que Dieu, alors qu’il est le Seigneur de toute chose ? Nul ne commet le mal qu’à son propre détriment, et nul n’aura à assumer les fautes d’autrui.

Univers et des Mondes. Dans le texte coranique arabe, on lit : « les deux Mondes ».

A me soumettre. Dans le texte coranique arabe, on lit : « et je suis le premier des musulmans. » Il est à noter que musulman a aussi l’acceptation de soumis.

La traduction standard est, là aussi, plus fidèle au texte coranique.

3, La famille d’Imran [médinoise]

3:31. Dis : « Si vous aimez vraiment Allah, suivez-moi. Allah vous aimera alors et vous pardonnera vos péchés. » Allah est Pardonneur et Miséricordieux

3:32. Dis : « Obéissez à Allah et au Messager. Et si vous tournez le dos… alors Allah n’aime pas les infidèles ! (1)

(1) Au messager : Muhammad (pbAsl).

3:31. Dis (Ô Mahomet, aux êtres humains) : si vous aimez Dieu, alors suivez-moi ; Dieu vous aimera et vous pardonnera vos pêchés. Dieu est plein de pardon et de miséricorde.

Selon Tabari, le verset 3:31 est la réplique de Mahomet à une délégation d’une tribu arabe chrétienne de Najran, reçue à la mosquée de Médine en 632. En protestant de leur amour de Dieu, les délégués de cette tribu reçurent cette réponse. Voyez la note au verset 3:61, plus bas, p. 16.

Les Signataires décontextualisent ce verset en y ajoutant, entre parenthèses, la mention « Ô Mahomet, aux êtres humains », absente du verset coranique et étrangère à son esprit.

p. 8

73, al-Muzammil [L’enveloppé, mecquoise]

73:8. Et rappelle-toi le nom de ton Seigneur et consacre-toi totalement à lui.

73:8. Invoque le nom de ton Seigneur et consacre-toi à Lui totalement.

Chapitre 2 : L’amour du prochain dans l’islam. p. 11

2, La vache [médinoise]

2:177. La bonté pieuse ne consiste pas à tourner vos visages vers le Levant ou le Couchant. Mais la bonté pieuse est de croire en Allah, au Jour dernier, aux anges, au Livre et aux prophètes, de donner de son bien, quelqu’amour qu’on en ait, aux proches, aux orphelins, aux nécessiteux, aux voyageurs indigents et à ceux qui demandent l’aide, et pour délier les jougs (1), d’accomplir la Salat [i .e. prière islamique] et de d’acquitter la Zakat [i.e. impôt religieux islamique]. Et ceux qui remplissent leur engagement lorsqu’ils se sont engagés, ceux qui sont endurants dans la misère, la maladie et quand les combats font rage (2), les voilà les véridiques et les voilà les vrais pieux.

(1) Littéralement, les cous, c’est-à-dire l’affranchissement des esclaves et des prisonniers de guerre.

(2) Dans la guerre contre les infidèles.

2:177. La piété ne consiste pas à tourner sa face du côté de l’Orient ou de l’Occident ; la piété c’est de croire en Dieu, au Jour dernier, aux anges, aux Livres et aux prophètes ; la piété c’est de donner de son bien – quelque attachement qu’on lui porte −, aux proches, aux orphelins, aux indigents, aux voyageurs et aux mendiants ; la piété c’est aussi de racheter les captifs, accomplir la prière, s’acquitter de l’aumône, demeurer fidèle à ses engagements, se monter patient dans l’adversité, dans le malheur et face au péril. Telles sont les vertus qui caractérisent les croyants pieux et sincères.

Aux Livres. Dans le texte coranique arabe, on lit « au Livre », au singulier, c’est-à-dire le Coran.

Les Signataires n’ont pas reproduit ici une traduction du verset 2:177, présentée pourtant comme telle dans leur lettre, mais une synthèse censée le résumer. Une synthèse infidèle qui, d’une part altère le sens du texte coranique avec le mot Livre, mis au pluriel afin d’occulter l’exclusivité du coran et qui, d’autre part, escamote totalement l’aspect de combat contre les infidèles (jihad), vaguement suggéré par « péril ».

Cela serait-il à mettre sur le compte de leur zèle à trouver des points de convergence avec le christianisme ?

3, La famille d’Imran [médinoise]

3:92. Vous n’atteindrez la (vraie) piété que si vous faites largesse de ce que vous chérissez. Tout ce dont vous faites largesse, Allah le sait certainement bien.

3:92. Vous n’atteindrez la piété qu’en faisant d’une partie des bien que vous aimez. Et quelque aumône que vous fassiez, Dieu en est parfaitement informé.

Chapitre 3 : Venez à une parole commune entre vous et nous. p. 13-16

p. 13

112, al-Ikhlas [Le monothéisme pur, mecquoise]

112:1. Dis : « Il est Allah, Unique

112:2. Allah, le Seul à être imploré pour ce que nous désirons.

112:1-2. Dis : Lui est Dieu et Un /Dieu se suffit à Lui-même.

La traduction des Signataires est fautive pour 112:2. L’écart est important en ce sens qu’il donne à ce verset une signification qu’il n’a pas.

41, Fussilat [Les versets détaillés, mecquoise]

41:43. Il ne t’est dit que ce qui a été dit aux Messagers avant toi. Ton Seigneur est certes Détenteur du pardon et Détenteur aussi d’une punition douloureuse.

41:43. Ce qui t’est dit aujourd’hui est la même chose que ce qui a été dit aux prophètes qui t’on précédé.

46, Al-Ahqaf [i.e. les dunes, et c’est aussi le nom d’une contrée désertique en Arabie saoudite, mecquoise]

46:9. Dis : « Je ne suis pas une innovation parmi les messagers ; et je ne sais pas ce que l’on fera de moi, ni de vous. Je ne fais que suivre ce qui m’est révélé ; et je ne suis qu’un avertisseur clair.

46:9. Dis (Muhammad) : Je ne suis pas nouveau parmi les messagers ! J’ignore le sort que Dieu nous réserve aussi bien à moi qu’à vous. Je ne fais que suivre ce qui m’est révélé, et ma mission ne consiste qu’à avertir en toute clarté.

16, an-Nahl, [Les abeilles, mecquoise]

16:36. Nous avons envoyé dans chaque communauté un Messager, [pour leur dire] : « Adorez Allah et écartez-vous du Taghüt » (1). Alors Allah en guida certains, mais il y en eut qui ont été destinés à l’égarement. Parcourez donc la terre et regardez quelle fut la fin de ceux qui traitaient [nos Messagers] de menteurs.

(1) Comprendre diable, idole et toute fausse divinité.

16:36. En vérité, nous avons envoyé un prophète à chaque communauté avec le message suivant : « Adorez Dieu et éloignez-vous du culte des idoles ! » Et si certaines de ces communautés ont suivi la Voie de Dieu, d’autres ont préféré le chemin de l’erreur. « Allez donc de par le monde et voyez quelle a été la fin de ceux qui criaient au mensonge ! »

Taghüt. Comme cela est suggéré par la note dans la traduction standard, Taghüt désigne tout esprit malfaisant. Taghüt est remplacé par « culte des idoles » dans la traduction produite par les Signataires.

Le terme Taghüt revient à plusieurs reprises dans le Coran

57, al-Hadid [Le fer, médinoise]

57:25. Nous avons effectivement envoyé Nos Messagers avec des preuves évidentes, et fait descendre avec eux le Livre et la balance, afin que les gens établissent la justice. Et nous avons fait descendre le fer, dans lequel il ya une force redoutable, aussi bien que des utilités pour des gens, et pour qu’Allah reconnaisse qui, dans l’Invisible, défendra Sa cause et celle de Ses messagers. Certes, Allah est fort et puissant.

57:25. Nous avons envoyé Nos messagers munis de preuves évidentes et nous avons fait descendre avec eux le Livre et la Balance, afin de faire régner la justice parmi les hommes.

Les Signataires synthétisent ce verset 57:25 plutôt qu’ils ne le traduisent. Il peut de la sorte être tronqué.

p. 14 : Venez à une parole commune !

3, La famille de Imran [médinoise]

3:59. Pour Allah, Jésus est comme Adam qu’Il créa de poussière, puis Il lui dit : « Soit » ; et il fut.

3:60. La vérité vient de ton Seigneur. Ne sois donc pas du nombre des sceptiques.

3:61. A ceux qui te contredisent à son propos maintenant que tu es bien informé, tu n’as qu’à dire : « Venez, appelez nos fils et les vôtres, nos femmes et les vôtres, nos propres personnes et les vôtres, puis proférons exécration réciproque en appelant la malédiction d’Allah sur les menteurs. (1)

3:62. Voilà, certes, le récit véridique. Et il n’y a pas de divinité à part Allah. En vérité, c’est Allah qui est le Puissant, le Sage.

3:63. Si donc ils tournent le dos… alors Allah connaît bien les semeurs de corruption !

3:64. Dis : « Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah. » Puis, s’ils tournent le dos, dites : « Soyez témoins que nous, nous sommes soumis. »

3:65. Ô gens du Livre, pourquoi disputez-vous au sujet d’Abraham, alors que la Thorah et l’Evangile ne sont descendus qu’après lui ? Ne raisonnez-vous donc pas ? (2)

3:66. Vous avez bel et bien disputé à propos d’une chose dont vous avez connaissance. Mais pourquoi disputez-vous des choses dont vous n’avez point connaissance ? Or Allah sait, tandis que vous ne savez pas.

3:67. Abraham n’était ni Juif ni Chrétien. Il était entièrement soumis à Allah (Musulman). Et il n’était point du nombre des associateurs. (3)

3:68. Certes, les hommes les plus dignes de se réclamer d’Abraham, sont ceux qui l’ont suivi, ainsi que ce Prophète-ci (4), et ceux qui ont la foi. Et Allah est l’allié des croyants.

(1) Allusion à la délégation des chrétiens de Najran, mais qui ne releva pas le défi. [Mahomet avait reçu à la mosquée de Médine, en 632, une délégation d’une tribu arabe chrétienne de Najran qui, selon la tradition musulmane, n’a pas relevé le défi qui lui aurait été lancé, mais avec laquelle un pacte fut néanmoins conclu.]

(2) Ce verset réfute aussi bien les prétentions des juifs qui affirment qu’Abraham était juif que celle des chrétiens qui disent qu’il était chrétien.

(3) Le mot arabe « Hanifan » signifie celui qui s’éloigne de toutes les doctrines faussées et adhère exclusivement à la vraie religion : l’Islam.

(4) Muhammad (pbAsl).

3:64. Dis : Ô gens des Ecritures ! Elevez-vous à une parole commune entre vous et nous, à savoir de n’adorer que Dieu Seul, de ne rien lui associer et de ne pas nous prendre les uns les autres pour des maîtres en dehors de Dieu. » S’ils s’y refusent, dites leurs : « Soyez témoins que, en ce qui nous concerne, notre soumission à Dieu est totale et entière. »

Soumis à Allah (Musulman). Dans le texte coranique arabe on lit : « Hanifan musulman ».

Contrairement à ce que disent les traducteurs dans leur note 3, hanifan (ou hanif) désigne celui qui, dans l’Arabie antéislamique, sans adorer les idoles païennes, n’est ni juif ni chrétien. En somme, un monothéiste sans obédience. Mahomet a fréquenté dans sa jeunesse des hanifs mecquois, dont la tradition nous a conservé le nom. Dans le souci d’islamiser Abraham, le Coran introduit ici un nouveau concept, celui du hanif musulman. En quoi le texte coranique arabe est plus clair que la traduction qui en est faite.

La traduction standard de ce verset 3:67 s’en trouve, sur ce point, inexacte dans sa forme et son contenu.

Des Ecritures. Dans le texte coranique arabe, on lit : « du Livre ».

Ce verset a été précédemment cité dans l’introduction de la lettre des Signataires. On a cru utile de l’entourer, ici, de versets le précédant et lui succédant afin d’en permettre une meilleure compréhension. Plus, haut, il a suscité le commentaire suivant :

« Plus fidèle, la traduction standard est celle qui traduit le mieux, dans la forme et « dans l’esprit, le texte coranique arabe.

« Dans la traduction produite par les Signataires, l’expression « Elevez-vous », juste « après l’apostrophe aux gens des Ecritures (juifs et chrétiens), signifierait-elle qu’on « considère ces derniers comme dans une position subalterne et qu’on leur enjoint, par « conséquent, de s’élever ?

Le titre de ce paragraphe reprend, en revanche, les termes coraniques exacts : Venez à une parole commune, auxquels il a été ajouté un point d’exclamation.

2, La vache [médinoise]

2:255. Allah ! Point de divinité à part Lui, le Vivant, Celui qui subsiste par lui-même « al Qayyum ». Ni somnolence ni sommeil ne Le saisissent. A Lui appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Qui peut intercéder auprès de Lui sans sa permission ? Il connaît leur passé et leur futur. Et, de Sa science, ils n’embrassent que ce qu’Il veut. Son Trône « Kursiy » déborde les cieux et la terre, dont la garde ne Lui coûte aucune peine. Et Il est le Très Haut, le Très Grand.

2:256. Nulle contrainte en religion ! Car le bon chemin s’est distingué de l’égarement. Donc, quiconque mécroit au rebelle tandis qu’il croit en Allah saisit l’anse la plus solide, qui ne peut se briser. Et Allah est Audient et Omniscient.

2:256. Nulle contrainte en religion.

Dans son tafsir, Tabari rapporte plusieurs anecdotes relatives à la contextualisation de ce début de verset, mais il opine que celui-ci ne s’adresse qu’aux Musulmans, dont la religion n’est pas source de contraintes puisque, comme le dit la suite du verset, c’est « l’anse la plus solide, qui ne peut se briser ».

« Nulle contrainte en religion » n’a donc pas de portée générale comme le donnent à entendre les Signataires. Les musulmans invoquent souvent ce bout de verset pour persuader que leur religion est tolérante.

60, al-Mumtahinah [L’éprouvée, médinoise]

60:8. Allah ne vous défend pas d’être bienfaisants et équitables envers ceux qui ne vous ont pas combattus pour la religion et ne vous ont pas chassé de vos demeures. Car Allah aime les équitables.

60:8. Dieu ne vous défend pas d’être bons et équitables envers ceux qui ne vous attaquent pas en raison de votre religion, et qui ne vous expulsent pas de vos foyers. Dieu aime ceux qui sont équitables.

Il y a derrière cette citation une mise en garde implicite, que le commentaire des Signataires, plus bas, p. 14-15, rend explicite : « En tant que musulmans nous disons aux chrétiens que nous ne sommes pas contre eux et l’islam n’est pas non plus contre eux – tant qu’ils ne déclarent pas la guerre aux musulmans à cause de leur religion, qu’ils ne les oppriment pas et qu’ils ne les expulsent pas de leur foyers (conformément au verset du Coran [al-Mumtahinah 60:8] précédemment cité. »

On ne peut s’empêcher de penser à la présence massive de musulmans en Europe et aux Amériques, aux caricatures de Mahomet parues dans la presse, à la guerre américaine en Irak, etc.

p. 15

3, La famille de Imran [médinoise]

3:109. A Allah appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre. Et c’est vers Allah que toute chose sera ramenée.

3:110. Vous êtes la meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour les hommes. Vous ordonnez le convenable, interdisez le blâmable et croyez à Allah. Si les gens du Livre croyaient, ce serait meilleur pour eux, il y en qui ont la foi, mais la plupart d’entre eux sont des pervers.

3:111. Ils ne sauront jamais vous causer de grand mal, seulement une nuisance (par la langue) ; et s’ils vous combattent, ils vous tourneront le dos, et ils n’auront alors point de secours.

3:112. Où qu’ils se trouvent, ils sont frappés d’avilissement, à moins d’un secours providentiel d’Allah. Ils ont encouru la colère d’Allah et les voilà frappés de malheur, pour n’avoir pas cru aux signes d’Allah, et assassiné injustement les prophètes, et aussi pour avoir désobéi et transgressé.

3:113. Mais ils ne sont pas tous pareils. Il est parmi les gens du Livre, une communauté droite qui, aux heures de la nuit, récite les versets d’Allah en se prosternant.

3:114. Ils croient en Allah et au Jour dernier, ordonnent le convenable, interdisent le blâmable et concourent aux bonnes œuvres.

3:115. Et quelque bien qu’ils fassent, il ne leur sera pas dénié. Car Allah connaît bien les pieux.

3:113-115.Cependant, les détenteurs des Ecritures ne sont pas tous les mêmes, car il y a parmi eux une communauté pieuse dont les membres passent des nuits entière à réciter les versets de Dieu et à se prosterner. / Ils croient en Dieu et au Jour dernier ; ils ordonnent le Bien, réprouvent le Mal, et s’empressent d’accomplir les bonnes œuvres. Ceux-là sont au nombre des justes. / Quelque bien qu’ils fassent, il ne leur sera pas dénié, car Dieu connaît bien ceux qui le craignent.

Vous êtes la meilleure communauté qu’on ait fait surgir pour les hommes. Notion de peuple élu chez les musulmans. Elle explique l’arrogance et la certitude infatuée des Arabes musulmans, mais aussi leur plénitude. L’obligation d’imposer l’islam sur la Terre tire son origine de ce verset.

Encouru la colère d’Allah. Dans le texte coranique arabe, on lit : « En raison de la colère d’Allah ».

La fin de 3:110 et 3:111-112 désignent les juifs. Ces versets sont à mettre en rapport avec le verset 1:7 de la Fatiha, commenté ci-dessus et où il est question de « ceux qui ont encouru Ta colère », auxquels il est souhaité, dans la prière musulmane, de ne pas être guidés dans le droit chemin.

Nous avons ici un exemple de ce que les savants commentateurs musulmans, auteurs de tafsir, désignent par « Expliquer le Coran par le Coran ».

4, an-Nissa [Les femmes, médinoise]

4:171. Ô gens du Livre (Chrétiens), n’exagérez pas dans votre religion, et ne dites d’Allah que la Vérité. Le Messie Jésus, fils de Marie, n’est qu’un Messager d’Allah, Sa parole qu’il envoya à Marie, et un souffle (de vie) venant de Lui. Croyez donc en Allah et en ses Messagers. Et ne dites pas « Trois ». Cessez ! Ce sera meilleur pour vous. Allah n’est qu’un Dieu unique. Il est trop glorieux pour avoir un enfant. C’est à lui qu’appartient tout ce qui est dans les cieux et sur la terre et Allah suffit comme protecteur. (1)

(1) Sa parole qu’il envoya à Marie : « Sois ». Trois : la trinité.

4:171. … Le Messie, Jésus fils de Marie, est un envoyé de Dieu, Son Verbe déposé dans le sein de Marie, un Esprit émanant de Lui…

La citation de ce fragment de verset par les Signataires, hors de son contexte, frise la mauvaise foi.

On comprend que ce verset, qui condamne la Trinité, soit tronqué dans une adresse aux autorités spirituelles de la chrétienté.

3, La famille de Imran [médinoise]

3:64. Dis : « Ô gens du Livre, venez à une parole commune entre nous et vous : que nous n’adorions qu’Allah, sans rien Lui associer, et que nous ne prenions point les uns les autres pour seigneurs en dehors d’Allah. » Puis, s’ils tournent le dos, dites : « Soyez témoins que nous, nous sommes soumis. »

3:64. … à savoir de n’adorer que Dieu Seul, de ne rien Lui associer et de pas prendre les uns les autres pour des maîtres en dehors de Dieu.

p. 15-16

2, La vache [médinoise]

2:135. Ils ont dit (1) : « Soyez Juifs ou Chrétiens, vous serez donc sur la bonne voie ». – Dis : « Non, mais nous suivons la religion d’Abraham, le modèle même de la droiture et qui ne fut point parmi les Associateurs. »

2:136. Dites : « Nous croyons en Allah et en ce qu’on nous a révélé, et ce qu’on a fait descendre (2) vers Abraham, Ismaël et Issac et Jacob et les Tribus, et en ce qui a été donné à Moïse et à Jésus, et en ce qui a été donné aux prophètes, venant de leur Seigneur ; nous ne faisons aucune distinction en eux. Et à Lui nous somme soumis ».

2:137.Alors, s’ils croient à cela même à ce que vous croyez ils seront certainement sur la bonne voie. Et s’ils s’en détournent, ils seront certes dans le schisme ! Alors Allah te suffira comme eux. Il est l’Audient, l’Omniscient.

(1). Ils ont dit : les Juifs et les Chrétiens.

(2). Ce qu’on a fait descendre : en révélation.

2:136-137. Dites (Ô musulmans) : Nous croyons en Dieu, en ce qui nous a été révélé, en ce qui a été révélé à Abraham, Ismaël, Issac, Jacob et aux Tribus ; à ce qui a été donné à Moïse et à Jésus ; à ce qui a été révélé aux prophètes par leur Seigneur, sans établir entre eux aucune différence. Et c’est à Dieu que nous sommes entièrement soumis. / Si les gens du Livre adhère à votre croyance, ils seront dans la bonne voie ; et, s’ils s’en détournent, c’est qu’ils ont opté pour la scission. Dieu te suffira contre eux car Dieu entend tout et sait tout.

p. 16

16, an-Nahl, [Les abeilles, mecquoise]

16:90. Certes, Allah commande, l’équité, la bienfaisance et l’assistance aux proches. Et Il interdit la turpitude, l’acte répréhensible et la rebellion. Il vous exhorte afin que vous-vous souveniez.

16:90. En vérité, Dieu ordonne l’équité, la charité et les libéralités envers les proches, et Il interdit la turpitude, les actes répréhensibles et la tyrannie. Dieu vous exhorte ainsi pour vous amener à réfléchir.

Acte(s) répréhensibles. Dans le texte coranique arabe, on lit : « la prostitution ».

Ici encore, la traduction standard est plus fidèle au texte coranique.

5, Al-Maïda [La table servie, médinoise]

5:48. Et sur toi (Mohammed) Nous avons fait descendre le Livre avec la vérité pour confirmer le Livre qui était là avant lui et pour prévaloir sur lui. Juge donc parmi eux d’après ce qu’Allah a fait descendre. Ne suis pas leurs passions, loin de la vérité qui t’est venue. A chacun de vous Nous avons assigné une législation et un plan à suivre. Si Allah avait voulu, certes Il aurait fait de vous tous une seule communauté. Mais Il veut vous éprouver en ce qu’Il vous donne. Concurrencez donc dans les bonnes œuvres. C’est vers Allah qu’est votre retour à tous ; alors Il vous informera de ce en quoi vous divergiez. (1)

(1) Pour confirmer le Livre : tous les livres révélés avant le Coran.

5:48. Nous t’avons révélé le Coran, expression de la pure vérité, qui est venu confirmer les Ecritures antérieures et les préserver de toute altération. Juge donc entre eux d’après ce que Dieu t’a révélé. Ne suis pas leurs passions loin de la Vérité qui t’est parvenue. A chacun de vous Nous avons tracé un itinéraire et établi une règle de conduite qui lui est propre. Et si Dieu l’avait voulu, Il aurait fait de vous une seule et même communauté ; mais Il a voulu vous éprouver pour voir l’usage que ferait chaque communauté de ce qu’Il lui a été donné. Rivalisez donc d’effort dans l’accomplissement des bonnes œuvres, car c’est vers Dieu que vous ferez retour, et vous éclairera alors sur l’origine de vos différences.

Prévaloir. Le texte coranique donne dans ce verset la prééminence au Coran sur la Bible et le Nouveau testament. L’exclusivité fait dire à certains commentateurs musulmans, dans les tafsir, que le Coran annule et remplace les Ecritures qui l’ont précédé.

Ce verset est à mettre enfin en rapport avec 3:110, cité ci-dessus, qui désigne les Arabes musulmans par peuple élu.

Cet aspect exclusif est gommé dans la traduction des Signataires, qui redoublent ici de mauvaise foi. Mauvaise foi que l’on ne saurait expliquer uniquement par le souci affiché de trouver des points de convergence avec le christianisme.

ANALYSE SOMMAIRE

A ma connaissance, c’est le premier texte où des muuslmans mêlent Coran et paroles d’Evangile dans un but a priori louable, savoir la paix dans le monde, à laquelle Musulmans et Chrétiens sont invités à concourir.

On s’y applique donc à trouver des points de convergence entre l’islam et le christianisme, quitte à tronquer certains versets cités, à en falsifier d’autres (comme dans 5:48 ci-dessus) et à faire dire à d’autres encore ce qu’ils ne disent pas.

Il est donc légitime de s’interroger sur la sincérité des Signataires de cette lettre.

Il apparaît qu’ils sont soucieux de la poursuite du dialogue islamo-chrétien, qui ne semble pas faire partie des priorités retenues par l’actuel pape Benoît XVI.

Le dialogue islamo-chrétien, initié à la fin des années 1970, a tourné à l’avantage de l’islam, que désormais l’Eglise « comprend » et « respecte », alors que rien la réciprocité reste problématique du côté de l’Islam.

Cette lettre, dont c’est le premier anniversaire d’envoi au pape Benoît XVI, comme le signale son titre, ne semble pas avoir reçu de réponse. Cela explique l’élargissement de sa diffusion auprès de l’ensemble des autorités spirituelles du christianisme, comme pour les prendre à témoin et forcer la main au Vatican.

Par le style, cette lettre reste un document musulman-type, où s’affichent la certitude et la morgue islamiques, si opposées à l’humilité chrétienne. Les mises en garde et les menaces à peine voilées qu’elle renferme et qui, sans le dire, font référence à un contexte international troublé (1), ne préjugent pas de la sincérité des signataires.

Vichy, 7 novembre 2007

(1) Affaire des caricatures, conférence papale de Ratisbonne, guerre américaine en Iraq, etc.