LA NATIVITÉ DU CHRIST,
ICÔNE DE SA DESCENTE AUX ENFERS
Comme pour le précédent article, il n'a pas été possible de placer les figures, pour cet article complémentaire à celui de Pâques, je renvoie le lecteur aux artivles placés sur ma page de Facebook.
Dans l’Église orthodoxe, la Nativité du Christ est une
fête très importante. Liturgiquement, l’Église voit en elle l’icône de la fête
de Pâques. C’est la raison pour laquelle, dans la partie consacrée aux
éphémérides du "Psautier commenté", la fête de la Nativité est
appelée « Pâques, fête de trois jours ». La notion de « trois
jours » doit être comprise non pas sur le plan de temps (durée), mais dans
le sens qualitatif : liturgiquement les offices de la Nativité contiennent
des éléments du Vendredi Saint, du Samedi Saint et de Pâques. Ces éléments se
retrouvent dans les offices des 24 et 25 décembre, à savoir : (1) le 24-XII
« les Heures Royales » (Vendredi Saint), (2) le 25-XII les Vêpres
avec la liturgie vespérale de St Basile (Samedi Saint) et enfin (3) la liturgie
eucharistique matinale de St Jean Chrysostome le jour de la Nativité (Pâques).
Dans la mesure où le 24 décembre correspond aux deux
derniers jours de la Semaine Sainte, l’Église prescrit un carême semblable à
celui de cette semaine.
Il est très important de comprendre que, du moment où
il y a relation très étroite entre les événements liés à la fête de Pâques,
fête mobile, et les événements de la Nativité, fête fixe, l’expression
liturgique de la Nativité se manifeste simultanément à travers ces deux cycles :
fixe et mobile (pascal). En ce qui concerne le cycle mobile (pascal), la
semaine en est une sorte d’unité où le septième et dernier jour, samedi, est
étroitement lié avec le premier (ou huitième), dimanche, et c’est précisément
le Samedi Saint avec Pâques qui rendent ce couple de jours de la semaine très
particuliers, comme vision du « Jour Un » du début de la création :
« Et Dieu appela la lumière : jour, et les
ténèbres : nuit. Il y eut un soir et il y eut un matin, jour Un ».
(Gen. 1, 5)
Le Samedi Saint correspond au domaine occupé par les
ténèbres (nuit) et Pâques à la lumière (jour).
Ainsi le samedi, au prix de la mort du Christ (sa
descente aux enfers), est libéré des ténèbres, et la Lumière de la Résurrection
envahit son domaine ; et le Jour Un prend l’aspect du Huitième où il n’y a
plus de ténèbres.
« De
nuit, il n’y aura plus ; ils se passeront de lampe ou de soleil pour s’éclairer,
car le Seigneur Dieu répandra sur eux Sa Lumière et ils règneront dans les
siècles des siècles. » (Apoc. 22, 5).
Liturgiquement cette particularité du samedi et du
dimanche se manifeste dans la fête de la Nativité du Christ chaque fois qu’il y
a occurrence du 24 décembre ("Vendredi et Samedi Saints" de la
Nativité) avec le samedi ou dimanche de la semaine.
En ce qui concerne le 25 décembre, si ce jour (la fête)
est un dimanche, l’aspect liturgique ne subit aucun changement. L’office
dominical est supprimé, et toute l’attention est concentrée sur l’événement de
la Nativité du Seigneur dans lequel l’Église voit aussi sa Résurrection.
Quant au 24 décembre, qu’il tombe un samedi ou un
dimanche, tout d’abord il n’y a pas de carême (au plan liturgique), ensuite la
structure liturgique elle-même subit des modifications notables.
D’une manière générale, la célébration de la liturgie
de St Basile est un signe de la préparation à un événement important, surtout
lorsque cette liturgie est célébrée en liaison avec les vêpres – c’est une
sorte d’entrée (eucharistique) dans les ténèbres (descente aux enfers) pour
porter le coup mortel et définitif à la mort elle-même.
Remarquons, à propos du samedi, que dans l’année liturgique,
la liturgie eucharistique vespérale est célébrée uniquement le Samedi Saint :
Une fois le Christ descendu aux enfers la mort est vaincue, et le samedi (de l’année
liturgique) devenant l’expression de cette victoire, sa liturgie eucharistique
est obligatoirement matinale et de St Jean Chrysostome, comme au jour de
Pâques.
Cette année (1989), le 24 décembre dans l’ancien
calendrier coïncide avec un samedi et dans le nouveau avec un dimanche. Étant
donné que le samedi (et d’autant plus le dimanche) exige sa liturgie
eucharistique matinale (de St Jean Chrysostome), cette année elle sera célébrée
à la place des « Heures Royales » qui seront reportées au vendredi
précédant le 24-XII (le 23-XII ou le 22-XII), et dans ce cas la liturgie
eucharistique de ce vendredi sera supprimée, comme au Vendredi Saint. Quant au
24 décembre, il faut tout d’abord célébrer la liturgie eucharistique de St Jean
Chrysostome, après laquelle on célèbrera le début des vêpres du 25 décembre qui
normalement précèdent la liturgie vespérale de St Basile, et ces vêpres s’achèveront
au moment où normalement (aux vigiles) commence la litie. Cette dernière est
déjà incluse dans les Vigiles de la Fête de la Nativité (entre les grandes
Complies et Matines). Quant à la liturgie eucharistique de St Basile elle sera
célébrée exceptionnellement le jour même de la Fête, le 25 décembre à la place
de la liturgie de St Jean Chrysostome. Ainsi la Fête de la Nativité du Seigneur
qui préfigure normalement la Résurrection, dans ce cas précis, par la présence
de la liturgie de St Basile, évoque particulièrement le Samedi Saint. La venue
du Fils de Dieu dans ce monde déchu, et acceptant la mort, devient l’Icône de
la descente aux enfers (Samedi Saint).
Dans le cas où le 24 décembre coïncide avec le
dimanche, un détail liturgique supplémentaire justifie cette affirmation :
aux Matines de ce jour, l’office dominical (selon l’octoèque) est pratiquement
supprimé, il est remplacé par des éléments hymnographiques composés en vue de
ce cas et placés dans le Ménée (l’office des Saints Pères). À travers ces
éléments l’Église met l’accent sur la Passion du Christ qui précède Sa
Résurrection, et les hirmi du canon dominical sont remplacés par ceux des
Matines du Samedi Saint.
En conclusion, rappelons la stichère dominicale des
matines à Laudes du 5e ton (ton pascal) :
« Tu es passé à travers le tombeau comme Tu es
né de la Mère de Dieu ».
Nicolas Ossorguine
Décembre 1989
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