En guise de
réparation à l’édition donnée :
Le sang du corps du droit
canon ou des acceptions de l’adage « Ecclesia abhorret a
sanguine » *
Michèle
Bordeaux **
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L’auteur
Agrégée de
sciences naturelles. Agrégée d’histoire du droit. Professeur à l’Université
de Nantes. Responsable de l’URA CNRS 1154 « Droit et Changement
social ». Développe et encadre des travaux en matière d’histoire des
femmes et des familles, portant préférentiellement sur la période 1930-1950
et les politiques sociales des États fascistes et conservateurs.
Parmi ses
publications :
— Qualifié
viol (en collab.), Genève, Médecine et Hygiène, coll. « Déviance et
Société », 1988 ;
— « 7
ans de réflexion : divorce et séparation dans la France de Vichy »,
in Actes du Colloque Droit et réalités sociales de la sexualité,
Toulouse, oct. 1985, Lille, L’espace juridique, 1987.
L’auteur
renoue ici à propos de filiation et de parenté avec ses recherches initiales
sur le sang :
— « Hématologie
géographique et histoire des coutumes », Annales ESC, Histoire et
biologie, 2, 1969 ;
et sur les
sources canoniques :
— Approche
économique de la vie de l’Église, Paris, LGDJ, 1969.
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** Université
de Nantes,
URA CNRS 1154 « Droit et Changement social », Chemin de la Censive du Tertre, F-44036 Nantes cedex 01.
1. Nous
proposerons des traductions libres des textes canoniques latins ne comportant
pas d’édition française contemporaine et des textes espagnols sur la pureté
du sang.
2. Nos
sources relèvent essentiellement du Corpus juris canonici fixé en 1580,
composé du Décret de Gratien, des Décrétales pontificales de 1187 à 1234, du
Sexte ou 6e Livre de Boniface VIII 1234-1298, des Clémentines de Clément V
(1298-1317), des Extravagantes de 1484. Cet ensemble de règles ou canons
ordonne en principe (malgré de forts espaces de désuétude) le comportement
des clercs et des laïques chrétiens, la vie sacramentelle des communautés et
leurs rapports avec les cités séculières jusqu’à la promulgation du Code de
droit canonique de 1917 (remanié après Vatican II et mis en application
récemment -1983-) et des commentaires et traités anciens et modernes référés
en bibliographie.
3. Les
grands instruments de travail tels le Dictionnaire de théologie
catholique, Le Dictionnaire de droit canonique reflètent cette
orientation par leurs entrées : au mot Sang on trouve Sang du Christ ou
Guerre, Soldats.
4. La
dernière et non des moindres étant l’acceptation de l’éventualité de la peine
de mort dans le nouveau Catéchisme (1992).
5. Toute
la théologie du Sacrifice serait en cause. Lire Drewermann, Les
fonctionnaires de Dieu, 1993, par ex. p. 94-95 et 241, ou le terrible
descriptif des Flagellants de l’abbé Boileau (1732).
6. 7°
degré canonique aligné sur le comput romain, auparavant le comput canonique
par personne et non par degré interdisait le mariage entre parents à un 14°
degré.
8. Rappelons
que la qualification du viol supposait (et ce en France jusqu’à la loi de
1980) un acte de pénétration génital hétérosexuel. On ne peut aussi manquer
d’évoquer les prises de position pontificales et ultramontaines de certaines
églises face à l’avortement des femmes violées, irlandaises ou bosniaques.
10. Codex
juris canonici, 1917, Can.1076 et 1078. L’affinité en ligne directe est un
empêchement dirimant à mariage à tous degrés, en ligne collatérale au
deuxième degré inclusivement. L’empêchement d’affinité est multiplié autant
de fois que l’empêchement consanguin dont il procède par le mariage avec un
parent consanguin d’un époux défunt. L’empêchement d’honnêteté publique naît
d’un mariage invalidé, consommé ou non, et d’un concubinage public ou
notoire. Il dirime le mariage en ligne directe au 1° et 2° degré entre hommes
et consanguins de la femme et vice versa.
Code de droit canonique 1983, Can.1092 : l’affinité en ligne directe dirime le mariage à tous les degrés ; Can.1093 : l’empêchement d'honnêteté publique naît d’un mariage invalide après que la vie commune ait été instaurée (retour à la consommation-contagion?) ou d’un concubinage notoire ou public ; et il dirime le mariage au premier degré en ligne directe entre l’homme et les consanguins de la femme et vice versa.
11. Les
ouvrages et articles sur la question sont multiples et récents, c’est un
domaine très vivant de publication de sources en Espagne et par les laboratoires
d’études ibériques français.
12. Ce
qui traduit souvent aussi une volonté politique d’exclusion de certains
opposants au régime auxquels on « trousse » une généalogie impure.
13. Trois
enquêtes successives et négatives dans une famille vaudront généralement
« certificat de pureté de foi » au XVIIe siècle mais cet usage
connaît encore des exceptions.
16. Métiers
vils : banquier, comédien, artiste, modèle, bourreau ... ;
naissances viles : descendants des précédents et de bâtards, voleurs et
criminels.
18. 12,
nombre symbolique dans les Évangiles : l’hémoroïsse a des pertes de sang
depuis 12 ans, la fille de Jaïre guérie par Jésus a 12 ans, peut-être
n’est-elle pas réglée.
19. Ensuite
elle apportera au prêtre à l’entrée de la tente un agneau d’un an et un
pigeon pour que soit pratiqué sur eux le rite d’expiation : sang
pour sang, le sang animal qui coule la purifie de son flux de sang.
20. Cf.
aussi la pratique de l’éviction de la parturiente et de l’accouchée hors la
pièce commune au Moyen Age.
21. SCS
(Sacrée Congrégation pour les Sacrements) « Inestimabile Donum »,
n° 18, 3 avril 1980 : AAS (Acta Apostolica Sedis) 72, 1980,
338, contrairement à des pratiques paroissiales concrètes fort répandues.
23. Sanctions
spirituelles telles les exercices de piété, la censure, l’irrégularité, la
déposition, la dégradation ; sanctions temporelles telles les aumônes et
amendes, la perte du fruit d’un bénéfice, le bannissement, la prison, le
fouet, les galères ; et enfin l’excommunication.
Lorsque le crime est énorme, la justice ecclésiastique ordinaire - celle de l'évêque par son official - défère le clerc ou tout autre auteur, au bras séculier.
25. À
propos des excès mystiques, on renvoie à la note 5 supra ; lire
aussi le chapitre sur les blessures volontaires de J.P. Roux (1988) en
particulier sur les castrats russes « les pigeons blancs ».
26. Cf.
Codex de 1917, Can. 985 §5 (irrégularité ex delicto), 1240 §1
(privation de sépulture chrétienne), 2350 §2 (suspension ad tempus).
Code 1983, Can. 1041 (irrégularité de l’auto-mutilé, et tentative de
suicide).
27. Pierre
de Fontaines, « Les vilains ne savent ce qu’est honneur et ne sont mie
is tenu de le garder ». T.A. Coutume de Bretagne « ...ils (les
nobles) doivent mieux savoir les droits et les coutumes, la raison, le bien
et le mal. » Bartole exprime l’idée que les vilains sont comme les
soldats, les paysans et les femmes, des ignorants du droit (donc dépourvus de
la raison qui permet d’apprécier une juste cause).
28. Mais
inapplicable. Les tournois et autres joutes, luttes, pugna seront
définitivement condamnés au XVIIe siècle par application extensive d’une
Constitution de Pie V interdisant les combats entre les hommes et les bêtes,
et non entre les hommes...
29. Puis
à dispense ordinaire dans le Code de 1917. On en est encore à dénier à un
clerc brancardier, durant la grande boucherie de la première Guerre mondiale,
la possibilité d’utiliser un scalpel, un bistouri, un instrument qui coupe
même s’il soigne ! Ainsi il faudra attendre 1936 pour que la Sacrée
congrégation pour la propagation de la Foi autorise les religieuses
missionnaires à apprendre et pratiquer l’art de l’accouchement. La même avait
permis aux ordinaires des missions depuis 1701 de pratiquer l’incision peu
grave ou la cautérisation par brûlure à partir du moment où il n’y avait pas
de risque mortel ou de mutilation d’un membre. Mais qui soignent-ils ?
des indigènes...
30. En
effet cette exonération est inutile car sans objet lorsqu’il s’agit de la
mise à mort d’un infidèle : ce n’est pas - par nature - un homicide. Le
chrétien n’encourt aucun risque d’excommunication lorsqu’il tue ou blesse un
hérétique.
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